Ah ben des fois je dois vivre dans plusieurs dimensions à la fois, j'étais persuadée d'avoir mis mon humble critique de
Nosferatu... et bé non.
Ceux qui connaissent un peu
Dracula et l'histoire de
Nosferatu ne s'étonneront pas que les histoires soient très très proches (une sombre histoire de droits d'auteurs tout ça) : un jeune clerc de notaire plein d'ambition et nouvellement marié est envoyé par son futur patron pour faire signer des actes de propriétés à un mystérieux Comte du fin fond de la Roumanie et... c'est le début des problèmes.
Franchement, pour moi, c'est une vraie réussite... une ambiance gothique tellement bien rendue, un côté suranné, voire même "à l'ancienne", qui rend finalement l'ensemble hors du temps (même les dialogues ampoulés, je trouve que ça participe de l'ambiance. Y'a rien de plus pénible que des dialogues trop "modernes" dans un film en costume, ça casse tout le rêve). On est entre les vieux films des années 30, avec des ombres qui s'allongent indéfiniment, des couleurs passées, du noir et blanc, et des impressions de gravures victoriennes.
Et historiquement, par petites touches, on sent qu'Eggers maîtrise totalement son sujet.
Et, dans tout ça, on retrouve une certaine modernité, par le traitement du personnage principal féminin, plus proactive... c'est finalement elle qui décide de la conclusion de l'histoire (en dépit de l'avis de son mari, censé être le "héros" qui est, lui, en position de subir).
Et pour le coup, j'ai trouvé Lily Rose Depp impeccable. Sans avoir d'avis préconçu, je ne connaissait pas son jeu, mais je la voyais surtout en "fille de". Ben là, je l'ai trouvé épatante. Il faut dire qu'avec son visage particulier, elle s'est parfaitement glissé dans l'univers.
... Et il parait que le prochain film d'Eggers continue sur la lancée, avec un film sur les loups-garous dans l'Angleterre du XIIIème siècle. Tourné en vieil anglais. ça promet...
Et tant qu'on y est...
Le Dossier Maldoror"Partiellement et librement inspiré d'une histoire vraie". C'est pour ainsi dire la présentation du film.
Il suffit de regarder la bande-annonce pour comprendre que l'histoire vraie en question, c'est l'affaire Dutroux.
Alors oui, à la manière d'un
Once upon a time in Hollywood, le réalisateur belge Fabrice Du Welz tord la réalité, comme pour exorciser une histoire qui hante encore la Belgique (et pas que). Mais, en même temps, parfois... tordre la réalité ne fait que la rendre plus vraie que vraie. Et clairement, pour moi, il passe des messages subliminaux (notamment sur la "théorie du réseau"*).
Si on revient au cinéma, et bien c'est un très bon thriller psychologique, assez brutal par moment, avec des passages de violence crue que je ne mettrais pas devant tous les yeux. Et c'est à la fois décomplexé, intense, et décalé (comme il sied au cinéma belge).
Grégory Bajon est épatant en héros brisé par le système, une sorte de Don Quichotte maladroit, emporté malgré lui par sa colère et sa quête de vérité. Pour ainsi dire, une victime sacrificielle...
*Qui est trop facilement, à mon sens, rejetée comme une "théorie du complot" alors, sans que j'ai des certitudes sur le sujet, je pense que tout assassin et pédophile qu'il était, Dutroux a sans doute été un fusible utile, d'une manière ou d'une autre.
D'ailleurs, concernant une autre affaire, celle des disparues de l'Yonne et Emile Louis, je vous conseille de visionner l'excellente série
La Conspiration du silence (et c'est gratuit sur FranceTV)... et vous verrez que, malheureusement, la possibilité de tuer et de poursuivre une "carrière" criminelle longue ne doit, en fait, rien au hasard. Et que c'est une conjonction assez effrayante d'incompétence, d'entre soi, de déni et, parfois, d'une forme de corruption qui ne dit pas son nom. Ne pas chercher ça "arrange" quelques personnes.
Et je pense que d'une manière ou d'une autre, c'est ce qu'il s'est passé dans l'affaire Dutroux.