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Pas de déconfinement en vue pour les plus casaniers trop attachés à leur parenthèse enchantée
C'est confiné que vous avez été le plus heureux? Tout s'explique.
Par Mélina Loupia
30/05/2020 05:15
CONFINEMENT - Après plus de deux mois de confinement, si l’envie de sortir est irrésistible pour certains, d’autres n’ont pas ressenti ce besoin de prendre l’air et ont au contraire pris du plaisir à rester chez eux et redécouvert le cocooning. Même l’idée de vacances en France cet été ne les séduit pas.
Et si le fait d’être pantouflard ou casanier était enfin vu comme une qualité? Et s’il ne fallait plus culpabiliser de préférer le canapé à la randonnée? Un changement de paradigme que le confinement a permis et qui a libéré certains.
Une “autorisation” de rester chez soi
Pour Fabienne, conseillère en insertion auprès de jeunes de 16 à 25 ans, “le confinement a été comme une ‘autorisation’ de rester chez soi, sans cette ‘pression’ de passer à côté de quelque chose à l’extérieur.”
Elle est bien chez elle mais admet être mal à l’aise avec cette “attirance” à rester à la maison. “J’ai toujours su au fond de moi que je suis plutôt du genre casanier. Moi qui adore le soleil, c’est cet aspect de ma personnalité qui me fait apprécier l’hiver, les journées courtes et les plaids sur le canapé. J’ai toujours lutté contre cette attirance car je sais aussi que, si on l’écoute, elle empêche selon moi de vivre des expériences et découvrir le monde.” explique-t-elle.
Interrogé par Le HuffPost, Joseph Agostini, psychologue et psychanalyste, connaît bien ce sentiment de culpabilité. “Le fait d’être casanier et pantouflard a longtemps renvoyé à la paresse, et la paresse intellectuelle en particulier”.
Fabienne ajoute “Je me suis mariée avec un homme qui tourne en rond dans la maison et qui a toujours besoin d’être en action et idéalement dehors!”.
Pour le psychologue, “le nomade est celui qui prend des risques, qui ‘bouge’, qui remet en question ses bons vieux réflexes. Il va vers les autres, s’ouvre à d’autres cultures, d’autres arts de vivre.”.
La peur de l’extérieur
“Face à un monde extérieur de plus en plus inquiétant ou désespérant, je dois reconnaître que ma maison représente un havre de paix et est le lieu dans lequel je me sens en sécurité”, conclut Fabienne.
Selon Fanny Parise, anthropologue et chercheuse, contactée par Le HuffPost, ce sentiment de sécurité à la maison est légitime et logique.“Le fait de ne plus avoir d’interactions sociales pendant un certain temps peut projeter le déconfinement comme quelque chose d’angoissant: violence symbolique de repartir dans une vie sociale plus classique.”
Cette peur de l’extérieur n’est pas que sanitaire, elle est également sociale. “Le déconfinement ne veut pas dire que le risque pandémique a disparu, les individus peuvent avoir peur du contact social”, ajoute-t-elle.
Une parenthèse enchantée
“Cette période, ce temps suspendu ont été merveilleux. Je suis déjà de nature solitaire et rester dans mon cocon en sécurité est génial”, explique Armelle, home organiser. “J’ai fait tout un tas de choses que je n’avais pas le temps de faire comme des formations, des lectures, des prises de conscience encore plus poussées.” dit-elle.
Fanny Parise observe que les individus qui ont bien vécu le confinement ont entre autres, ce sentiment de parenthèse enchantée. “Ils ont mobilisé ce moment comme constructif pour l’après (relations familiales, amoureuses, stratégies professionnelles, mieux se connaître)”, explique-t-elle.
Syndrome de la cabane
Pour l’anthropologue ce phénomène s’explique très bien et porte même un nom: le syndrome de la cabane. “La plupart des individus qui vivent bien le confinement n’avaient pas une vie sociale à l’extérieur de leur logement trop riche avant le confinement, disposent d’un lieu de vie ou un environnement de proximité favorable, se sentent en sécurité au quotidien, chez eux, au travail ou à l’extérieur, ou encore ont la capacité à mettre en place de nouveaux types d’activités: pratiquées avant, soit débutés pendant le confinement”, analyse-t-elle.
Le déconfinement n’a pas changé la façon de vivre d’Armelle. “Encore maintenant, je ne sors que pour le nécessaire. Ce coté ‘j’apprécie mon chez moi’ dans l’esprit Lagom me ravit.” nous confie-t-elle.
Le Lagom qu’évoque Armelle est cet art de vivre d’origine suédoise qui se traduit par une quête d’équilibre par le juste milieu, le simple, la stabilité.
Ainsi, à la façon du hygge, le bien-être à la danoise, l’art et le plaisir de rester chez soi, seul ou avec ses proches, le confinement a relancé cette tendance que l’on apprécie généralement plus à l’automne ou en hiver.
En 2016 sur Le Monde, Helen Russell, journaliste britannique qui a quitté Londres pour s’installer dans la campagne danoise avec son mari, observe que le syndrome de la cabane se développe aussi en France. “Le besoin de créer un cocon chez soi, de renforcer le sentiment de sécurité, est palpable, en particulier depuis les attentats.”(de 2015, NDLR) . Elle ajoute “Nous avons besoin du confort et du répit qu’apporte le hygge. Il ne s’agit pas d’ignorer les problèmes mais de prendre soin de soi pour avoir la force de les affronter”.
Vers “l’âge d’or” du casanier
Joseph Agostini analyse l’évolution de l’esprit casanier. Selon lui, “le sédentaire casanier voit sa représentation évoluer, avec le développement vitesse grand V des nouvelles technologies, l’ascension phénoménale du télétravail, en particulier pendant le confinement”.
Le casanier serait-il le nouvel héros actif? C’est ce que pense le psychologue. “Rester chez soi n’est plus, comme avant, synonyme d’inactivité. Au contraire. On peut tout à fait travailler sans sortir de son salon. C’est un fait accepté, plus seulement toléré. De plus, les méfaits de l’industrie sur l’environnement (l’empreinte carbone par exemple) desservent le nomade. La jouissance à tous crins renvoie à une certaine forme d’égoïsme, aux dépens de la communauté. Cette jouissance, très idéalisée pendant des décennies, a perdu de sa superbe” explique-t-il.
Une seule inconnue perdure, est-ce que ces nouvelles tendances vont perdurer, ou bien la routine du “monde d’avant” reprendra-t-elle le dessus? En attendant, casaniers, adeptes du cocooning, vous avez encore de beaux jours devant vous!
https://www.huffingtonpost.fr/entry/pas-de-deconfinement-en-vue-pour-les-plus-casaniers-trop-attaches-a-leur-parenthese-enchantee_fr_5ece2f42c5b6367232b0d5ed?utm_hp_ref=fr-homepageEt bien après avoir parlé du confinement... on peut parler du déconfinenement ?...
Personnellement, je me suis pas mal reconnue dans cet article... contrairement à pas mal de monde autour de moi, ben je n'ai pas mal vécu le confinement en soi. Au contraire même... Bon, je fais partie de ceux qui ont pu télétravailler sans trop de souci, et qui n'angoissent pas spécialement pour leur avenir. Je n'étais même pas pressée que le 11 mai arrive, alors que j'avais l'impression que tout le monde barrait les jours dans le calendrier comme des prisonniers attendant la quille...
C'est toujours dans ces moments-là que je me sens à côté de la plaque... enfin, pour une fois, j'ai envie de dire je n'étais pas celle qui tentait de faire bonne figure socialement parlant au milieu de la foule pour tenter d'avoir des interactions positives avec ses semblables... je me contentais de profiter... Ce genre d'articles déculpabilisent un peu finalement, parce que mine de rien, être introverti, et préférer passer sa soirée avec un bouquin ou un bon film, plutôt que sortir ça reste mal vu. Comme si on était une sorte de vilain petit canard misanthrope (ce que je suis un peu. Mais c'est pas pour autant que je n'aime pas,
de temps en temps, profiter de la présence de
certaines personnes, triées sur le volet... )
J'avoue, j'ai même un peu de mal à reprendre un rythme de vie plus social... voir des gens, parler avec des gens, c'est toujours source de fatigue mentale pour moi, et du coup, oui j'admets que j'ai apprécié cette solitude, ce silence... à la limite, il ne m'a manqué qu'un jardin, sinon, ça aurait été juste parfait.
