Jérimadeth a écrit:
Je ne veux inquiéter personne. Juste, je me sens piégé dans un monde condamné.
Et je voulais savoir comment vous faites vous pour continuer à vivre.
En ce qui me concerne, j'ai entendu parler d'effondrement il y a longtemps (7 ans ? 8 ans ?), alors que le sujet n'était pas encore devenu mainstream, et tous les choix de vie que j'ai fait depuis ont été orientés dans cette direction : se préparer à une situation future qui allait être beaucoup plus tendue, instable et potentiellement dangereuse que la situation actuelle (quelle que soit la forme précise que cette situation future puisse prendre). J'ai fait une croix sur ma carrière professionnelle, j'ai déménagé dans une petite ville avec de la campagne autour, j'ai fait mon possible pour devenir propriétaire d'une baraque costaude et d'un terrain...
Il reste encore beaucoup à accomplir, mais le simple fait d'avoir été actif et d'avoir pris les choses en main (à plus forte raison que ces actions commencent maintenant à porter leurs fruits) me rend beaucoup plus serein. Probablement pour la première fois dans ma vie, j'ai eu l'impression d'avoir fait quelque chose qui avait réellement du sens, et qui était en accord avec ce que je ressens au fond de moi.
Il est probable que si je vivais actuellement dans un petit appartement d'une grande métropole, je serais en train me ronger les ongles jusqu'au sang, en pleine dissonance cognitive, à sentir que tout part vau-l'eau mais sans savoir quoi faire. Avec l'impression d'être un prisonnier, tournant en rond dans sa cellule en attendant que la sentence soit prononcée.
J'ai été beaucoup aidé par le fait que, quasiment dès le départ, j'ai été bien entouré : j'ai rencontré un groupe de personnes qui partageaient ma vision des choses (et avec lesquelles j'avais des atomes crochus manifestes au delà des questions d'effondrement) et c'est ensemble qu'on a mené à bien toutes ces actions. Je n'ose pas parler de "communauté", parce que le terme est très connoté, mais je pense que c'est bien ce dont il s'agit en réalité.
Tout seul, je n'aurais jamais eu la force de faire le quart de ce qui a été fait. Mes très proches (famille) n'ont jamais compris ces histoires-là.
Bref, c'est le seul conseil que je peux donner à quelqu'un qui se trouve dans ta situation : ne pas rester seul, mais trouver des gens avec qui échanger. Et ne pas rester inactif, mais au contraire essayer de faire des choses qui te semblent aller dans le bon sens. Quelles qu'elles puissent être : rejoindre un mouvement de militants de type Extinction Rebellion, devenir survivaliste, créer un écovillage... les possibilités sont vastes, et aucune n'est fondamentalement plus mauvaise qu'une autre.
Jérimadeth a écrit:
Il y a certes une autre frange plus pessimiste, type Adrastia. mais justement ça me fait marrer qu'un mec comme Mignerot qui passe son temps à parler d’honnêteté ne parle pas franchement. Le fond de sa pensée oscille entre retour à l'âge pierre et disparition simple de l'humanité (ce qui n'est pas forcément faux). Mais il faut le lire pas mal pour comprendre ça (et sa façon de traiter de vaine toute les tentatives/actions de mobilisations des gens est juste gerbante).
A la décharge de Vincent Mignerot (qui est probablement l'une des figures du mouvement collapso avec laquelle je me sens le plus en accord), il a essayé par le passé d'exprimer franchement et sans détour le fond de sa pensée... et ça ne lui a pas réussi : il s'est pris une shitstorm massive de la part de gens lui reprochant, comme tu le fais, d'être une voix de Cassandre se complaisant à détruire les espoirs des autres. Du coup, maintenant, il ne le fait plus, d'où peut-être cette impression de double-langage que tu ressens.
Mignerot rappelle juste ce que beaucoup de gens dans le milieu de la collapso ont tendance à oublier, plus ou moins volontairement, en se racontant des récits d'un effondrement qui serait l'occasion de se débarrasser du capitalisme et de construire un monde nouveau où les hommes et la nature vivraient en harmonie. Je trouve personnellement que c'est une piqûre de rappel salutaire : le but n'est pas de dire aux gens
« c'est impossible, vous êtes idiots de penser comme vous le faites, votre projet est naïf et n'aboutira jamais », mais plutôt
« ça va être p'têt plus compliqué que ce que vous pensez, regardez ce que disent les données scientifiques et l'histoire de l'Humanité ». Mais manifestement, c'est un discours qui n'est pas audible auprès de tout le monde.