Chimère a écrit:
je me disais... puisqu'il existe toujours, à notre époque, des peuples vivant plus ou moins comme au Néolithique, est-ce qu'il n'est pas envisageable d'imaginer qu'au Moyen-Âge (vu qu'il y a des éléments à Glozel qui auraient été daté du 13ème siècle, mais bon, je pensais pas que les pierres se dataient mais bref, passons), de tels peuples aient pu existé en France ?
La datation des pierres est possible avec des méthodes radiométriques ou isotopiques (mais cela renseigne sur l'âge de la matière elle-même, pas sur le moment où l'on a gravé une tablette de pierre) ; et pour les objets en céramique qui ont été cuits dans un four, la méthode de thermoluminescence est la plus employée.
Il semblerait (dixit Wikipédia, j'avoue ne pas très bien connaître l'affaire Glozel) qu'un certain nombre d'artefacts ont été datés de l'Antiquité et du Moyen-Age, ce qui veut dire qu'au moins une partie des objets retrouvés sur le site sont authentiques. Ce qui ne veut pas dire que le site lui-même le soit : on peut imaginer que les faussaires (puisque certains objets sont manifestement et incontestablement des faux) aient récupéré et enterré des artefacts anciens sur place pour brouiller les pistes.
En ce qui concerne ta question, je pense qu'il y a différentes façons d'y répondre selon l'angle avec lequel on l'aborde :
- y avait-il au Moyen-Age des peuples restés isolés techniquement et culturellement du reste du monde depuis le Néolithique ?
- y avait-il au Moyen-Age des gens vivant encore « comme au Néolithique », techniquement parlant ?
- y avait-il au Moyen-Age des communautés pratiquant encore le paganisme ?
A la première question, pour autant que je sache, la réponse est non : entre le fait que la France du Xème siècle était lourdement anthropisée (le pays avait déjà été bien défriché par les Gaulois lorsque César leur rend visite en - 50 av. J-C), et les importants passages de populations diverses (Celtes, Romains, Francs, Wisigoths, Ostrogoths...) durant l'Antiquité et le Haut Moyen-Age, je doute qu'il y ait encore eu des vraies populations relictuelles en France. Même dans les coins paumés — enfin, 'paumés' selon nos critères actuels.
On dispose d'un exemple de population issue du Néolithique : les Basques, qui sont ethniquement les descendants des populations européennes de l'âge du Bronze (donc avant l'arrivée des populations indo-europénnes steppiques aux environs de -1000 av J-C). Et force est de constater qu'ils étaient très bien intégrés à l'Empire Romain, au moins commercialement si ce n'est culturellement.
A la seconde question, en revanche, la réponse est oui... Et je pense que cela a duré en réalité jusqu'à une époque étonnement tardive. A la fin du 19ème siècle, Anatole le Braz collecte en Bretagne les récits de personnes très âgées qui sont nées sous l'Ancien Régime, et elles décrivent le mode de vie absolument misérable des parias ou des miséreux de l'époque : leurs maisons sont des cabanes rudimentaires en écorce, en terre ou en pierres mal ajustées ; le mobilier est rudimentaire voire inexistant...
Mais il s'agissait presque toujours de personnes très isolées socialement, pas de vraies "communautés" au sens strict. A partir du moment où les gens sont assez nombreux, ils s'organisent, partagent les tâches et arrivent à hisser leur niveau de vie (de fait, il valait probablement mieux naître cagot du Moyen-Age ou membre d'une tribu du Néolithique, que mendiant au 18ème siècle).
Quant à la troisième question, là encore, il y a un certain nombre d'indices qui laissent penser que le paganisme gaulois ou gallo-romain a perduré jusqu'au Moyen-Age.
La religion chrétienne n'est devenue officielle dans l'Empire Romain qu'au 4ème siècle, et elle s'est d'abord répandue dans les grands centres urbains. Connaissant la résilience que peuvent avoir les éléments culturels, il n'est pas du tout étonnant qu'on ait encore trouvé des païens (ou des gens partiellement païens) dans les campagnes françaises 500 ou 600 ans après. De toute façon, le culte catholique voué aux saints ou la tradition des fontaines miraculeuses, ce ne sont jamais que des formes adaptées de pratiques déjà attestées chez les gaulois.