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Après, il y a la question à 10 000 euros : rejetter les comportements sans-gênes et irrespectueux, est-ce faire preuve d'un mépris de classe ?
Mépris de classe ou pas, je n'en sais rien et ce n'est pas à moi d'en décider: je ne te connais pas vraiment et je sais que tes idées politiques sont globalement très proches des miennes. Aussi, je me doute très fortement que ce n'est pas du tout ton intention quand tu tiens ce discours.
Seulement, parfois, on tient (et c'est vrai pour tout le monde sans exception) des discours sans se rendre compte de ce qu'ils disent vraiment au fond (et je ne suis pas du tout en train de te traiter d'idiot, tu t'en doutes bien: tu sais le respect, la sympathie et la considération que j'ai pour toi. J'ose même dire l'admiration tant je me suis régalée un nombre incalculable de fois en te lisant et tant tu m'as appris de choses). Mais voilà, parfois, pour une raison ou un autre, on n'a pas déroulé son argument ou sa réflexion jusqu'au bout. Ici, tu le dis toi même: le fait que tu n'aies pas pu dormir alors que tu as beaucoup travaillé joue probablement, sans compter les questions politiques sous tendues par tout ça (là-dessus, tu sais que je suis complètement d'accord).
Mais c'est comme lorsque j'écris que les classes populaires fêtent les événements marquants de manière plus bruyante, cela sans plus d'argument. Je n'ai pas réfléchi jusqu'au bout et Pochel me fait remarquer qu'il y a certainement de bonnes raisons à ça. Je ne peux que reconnaître qu'il a très probablement raison.
Bref, ici, tu demandes si "rejetter les comportements sans-gênes et irrespectueux, c'est faire preuve d'un mépris de classe".
A cela je réponds que c'est, encore une fois, une question d'appréciation personnelle, de valeurs, de point-de-vue. C'est une question politique et sociologique aussi. Parce que parler de comportements "sans gêne et irrespectueux", c'est déjà un jugement de valeur (et tu as le droit, hein! Ce n'est pas la question. J'ai moi aussi des jugements de valeurs quotidiens). Mais ici, ce ne sont pas les qualificatifs que je choisirais d'employer me concernant, par exemple. Vu de ma fenêtre, je vois un pays en fête et un pays en fête, ça s'entend, ça se voit et ça fait du bruit. Je ne fais pas de lien avec un côté sans-gêne. Les gens ne descendent pas dans la rue dans l'intention de nuire (la majorité d'entre eux en tout cas). Ils descendent avant tout pour "communier" avec ceux qui sont sur la même longueur d'ondes et pour partager leur joie. Le bruit et les nuisance sonores, c'est un dommage collatéral mais pas le but en soi.
Et quand je dis que c'est aussi politique et sociologique, c'est en écho direct avec la remarque de Pochon. Une fois que l'on se dit que les gens descendent aussi probablement dans la rue parce qu'ils n'ont pas vraiment d'espace pour fêter les choses de manière moins visible et bruyante, on comprend que les accuser de faire trop de bruit n'est peut-être pas le truc le plus juste ni le plus approprié.
Cela m'amène d'ailleurs à penser que la solitude est souvent grande dans les grandes villes (et sûrement partout ailleurs). Je pense que beaucoup essaient aussi de tromper la leur et de tromper l'ennui en participant à ce type d'événements. Peut-être même certains espèrent-ils faire des rencontres (au sens large: je parle de rencontres fraternelles/amicales). D'autres encore, sûrement plus pragmatiques, doivent se dire que, tant qu'à ne pas dormir, autant profiter de la fête.
Bref, il y a sans doute tout un tas d'explications possibles qui peuvent nous permettre de ne pas tomber dans le jugement trop facile trop vite (et puis on peut aussi, du reste, tout bêtement aimer être au coeur de l'ambiance, aimer la foule, aimer les grands rassemblements, aimer le bruit, être curieux tout simplement, et se dire que c'est une expérience à part entière, etc.)
Et puis, attendre des autres qu'ils s'adaptent à nous, c'est aussi oublier que l'on peut aussi essayer de s'adapter à eux. On peut par exemple ne pas aimer du tout le foot mais aimer ces festivités et avoir envie d'y participer pour l'ambiance, pour le souvenir, pour l'état d'esprit. A l'inverse, on peut adorer le foot et détester toute cette liesse et cette foule, auquel cas, on restera chez soi fenêtre fermées, boules quies sur les oreilles, en se disant que si les autres ont envie de faire la fête, après tout, on n'y voit pas de problème. Chacun son truc. Et on peut aussi, bien sûr,
et détester le foot
et détester la liesse. Mais on peut difficilement attendre que la majorité d'un pays s'en tienne à cette unique vision des choses.