Je place le sujet dans 'Capacités' (genre 'capacités du cerveau humain à faire n'importe quoi') mais vous pouvez le changer si vous le souhaitez !
Titre au pluriel au cas où il y aurait d'autres volontaires...
Voici mon faux souvenir, comme promis dans l'autre sujet.
Pour mon anniversaire en 2007, j'ai été invitée dans un excellent restaurant, le Logis du Guetteur aux Arcs-sur-Argens (et hop, un peu de pub bien méritée).
Cadre magnifique (château du XIème siècle surplombant le village), menu excellent, terrasse paradisiaque (à laquelle il faut ajouter, ce soir-là, le lever de la pleine Lune en direct sous nos yeux zéblouis), bref, rien que du bon.
Depuis, je n'ai eu de cesse que d'y retourner avec quelqu'un capable d'apprécier le tout (chose faite il y a deux ans !).
En mai 2014, ma sœur que nous allons appeler H vient dans la région (ça n'arrive pas souvent) avec son copain, chez mon autre sœur que nous appellerons G qui habite dans la région. Il est question d'aller au restaurant. Je m'adresse à H avec enthousiasme : 'Et si on retournait au Logis du Guetteur aux Arcs ? Tu te souviens ?'
Ma sœur me fait des yeux de merlan frit et jure ses grands dieux qu'elle n'a jamais mis les pieds au Logis du Guetteur. Je lui décris les détails les plus précis qui soient. Non, non, jamais. Je pense un moment qu'elle me fait marcher - ce serait un juste retour des choses d'ici-bas, d'ordinaire c'est moi qui la fais marcher ! Mais non. Sérieux. Jamais mis les pieds.
J'ai subitement et violemment de sérieux doutes sur ma santé mentale... parce que voici les 'détails les plus précis qui soient' :
- ma sœur H a un genou en brandade de morue depuis un accident de ski en 1977 : déchirure des ligaments croisés. Opérée, puis ré-opérée plusieurs fois. Il y a eu des périodes où elle pouvait à peine marcher. J'ai donc gardé le souvenir de m'être inquiétée de ce fait, d'avoir téléphoné au resto pour réserver, et d'en avoir profité pour demander s'il était possible de se garer tout près pour lui éviter la longue marche sur pente raide. Mais comment donc, m'a répondu le resto, c'est tout à fait possible, s'il n'y a pas de place, ce qui arrive souvent, vous pouvez toujours laisser votre sœur et aller garer votre véhicule un peu plus loin.
- je me souvenais de ladite opération dépose de ma sœur (qui était très contente de ne pas avoir eu à se taper le trajet à pied). En revanche, je ne me souvenais pas du trajet pour monter, car quand j''y suis retournée avec un copain en 2015 nous avons galéré comme des malades pour trouver le chemin du resto, qui est assez mal indiqué. Je ne me
souvenais pas non plus du chemin pris quand j'y suis allée en 2007...!
- je me souvenais de la table exacte où nous avons été installées. Pas sur la terrasse, car ma sœur est très frileuse. A l'intérieur, une petite table carrée pour deux dans une salle très étroite, aux murs en pierres apparentes, pas très loin de la cuisine.
- je ne me souvenais pas des plats choisis, mais curieusement, je me souvenais de notre plaisir à déguster, barjaquer, commenter la gastronomie et le cadre (ma sœur est historienne de formation et fan des vieilles pierres).
Tous ces souvenirs précis, en 3D, étaient faux.
Je précise au passage que la table carrée dans la salle étroite près des cuisines existe, je l'ai vue en 2015. Je l'ai probablement aussi vue en 2007, mais pourquoi cette table en particulier ?
Je ne comprends toujours pas ce qui a pu se passer. Rêve ? Drôlement réaliste et terre-à-terre... En général, mes rêves sont des histoires fantastiques ou de science-fiction ! Rêverie éveillée, due à mon enthousiasme et mon désir de retourner dans ce resto ? Ça ne peut pas être dû à une discussion à ce sujet avec H, elle s'en serait souvenue - château du XIème et gastronomie divine, ça l'aurait motivée...
Alors quoi ? Je ne sais pas.
Depuis, à chaque fois que je ravive un souvenir, j'ai le réflexe de me méfier...
Tiens, d'ailleurs, ça a recommencé plus récemment, et toujours avec la même sœur ! Lors d'une conversation téléphonique il y a quelques mois, elle m'a juré que je n'approuvais pas du tout la décision de mon père de faire don de son corps à la science. Mon souvenir était que je n'y voyais absolument aucun inconvénient, entre le moment où il nous a annoncé cette décision et sa mort en 1986.
Au secours. Si on ne peut même plus faire confiance à son propre cerveau....!
Ou alors, c'est ma sœur. Que nous appellerons désormais non pas H, mais 'Faiseuse de faux souvenirs' (si vous avez de meilleures idées je suis preneuse).
Pardon pour le pavé.
