Metronomia a écrit:
Ce que j'observe, c'est que je ne me reconnais plus dans rien de ce qui est actuellement proposé par la zététique (ou ce que j'en connais).
Je comprends ton besoin de prendre de la hauteur, du recul, appelons ça comme on veut. Je n'ai pas agi autrement lorsque j'ai cessé formellement toute activité zététique il y plus de deux ans (le forum de l'Encyclopédie me servant, en quelque sorte, de poste de veille).
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Comme déjà exprimé maintes fois, lorsque la zététique s'applique aux phénomènes paranormaux, elle peut m'intéresser.
Sans doute parce que c'est le domaine où elle peut le mieux s'appliquer de manière "neutre" si je puis dire, en étant dégagée au maximum d'arrière-pensée. Ce que je vais écrire va peut-être vexer, mais les sujets traités ont le plus souvent une importance sociale mineure. Et encore, avec les théories du complot ça n'est déjà plus vraiment le cas.
Ce cadre permet d'utiliser au mieux la zététique pour ce qu'elle est : une méthode d'enseignement de l'esprit critique via l'investigation des phénomènes réputés paranormaux, et basée sur la démarche sceptique ("je doute, donc j'enquête"). On a là des outils, appliqués à des exemples qui les rendent explicites et accessibles. Il n'est pas nécessaire de sortir de ce champ. Le travail fait actuellement sur l'Encyclopédie montre qu'il y a suffisamment de vidéos douteuses qui apparaissent régulièrement sur les réseaux sociaux pour illustrer une ou plusieurs facettes de la zététique.
Bien sûr, une fois appris, ces outils zététiques peuvent être appliqués n'importe où. Mais c'est une démarche personnelle, à mon sens. Elle ne nécessite pas de courant de pensée, d'école ou de meneur, car le but du jeu est précisément de donner aux gens les outils qui leur permettront de penser par eux-mêmes. Après, ils doivent se débrouiller. En écrivant ce paragraphe, je pense particulièrement à un ancien membre de l'OZ, qui l'a compris bien avant moi.
Dès que l'on sort du cadre pédagogique, on s'expose à la récupération. Pourquoi ? Parce que la zététique est une boîte pleine d'outils efficaces et reconnus comme tels, donc convoités. Peu importe qu'on s'en serve réellement ou non : dans le monde superficiel des réseaux sociaux, il suffit de les afficher, de s'en revendiquer, pour se donner une légitimité ou une aura d'objectivité.
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Je suis en plein là-dedans en ce moment. Pour des raisons personnelles, la zététique n'est tout simplement pas ce qui me fait du bien actuellement.
Eh bien, personne ne t'en voudra, je pense. Pourquoi ? Justement parce que c'est une démarche personnelle. La zététique permet d'apprendre à être rationnel, et à l'être avec constance (via l'application d'une méthodologie). Sauf qu'on ne peut pas demander à quelqu'un d'être rationnel 100% du temps. Tu veux rêver ? Eh bien, vas-y. Dans la fameuse maxime de Broch "le droit au rêve a pour pendant le devoir de vigilance", il y a "droit au rêve", bordayl. Du moment qu'on reste vigilant pour soi, et qu'on n'entraîne pas les autres vers des âneries en profitant de leur manque de vigilance, justement, eh bien je n'y vois pas de problème.
J'ai appris la méthodologie de l'historien à la fac. Je m'efforce de l'appliquer au mieux quand j'écris un truc sur la guerre de Sécession ou même quand je modde des jeux de stratégie. Il n'empêche que je mets ces réflexes entre parenthèses devant n'importe quel film à contexte vaguement historiquement. Là où Un Odieux Con*nard frise la crise d'apoplexie en visionnant
Dunkerque, je n'aurais probablement pas relevé le quart de ce qui l'a fait bondir. Et pourtant, je suis un fukken geek pour ce qui est de l'histoire militaire. Et croyez-le ou non, mais c'est la même chose devant
Orgueil et préjugés et zombies.
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je trouve que la zététique déraille le plus souvent lorsqu'elle s'en va sur le terrain de la politique et ça commence à me poser un vrai problème. Pour cette raison, le Cortecs et le discours de Monvoisin seraient le courant dans lequel je me retrouve le plus.
Néanmoins, je n'oublie pas non plus ce que je t'ai dit et que je pense toujours: si je suis pour qu'on apprenne aux gens comment penser, en aucun cas je ne souhaite qu'on leur apprenne quoi penser. Or, c'est clairement l'orientation qu'a choisi le Cortecs et cet aspect-là ne me convient pas.
La zététique dérape parce que comme expliqué précédemment, elle n'y est plus qu'un instrument forcément docile (vous avez déjà vu une perceuse se rebeller ?) entre les mains de gens qui ont des idées à imposer (parce qu'on ne discute plus aujourd'hui, on impose) ou des dogmes à promouvoir. Même l'IMI s'est revendiqué de la zététique ! Il n'y a pas plus de légitimité à cela que dans la démarche éminemment politique du Cortecs. Juste de la récup', de l'instrumentalisation. C'est à la portée de tout le monde, nul besoin d'être une personne éclairée.
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Peut-être comprendras-tu mon ras-le-bol?
Oui, je le comprends. Internet en général, et les réseaux sociaux en particulier, sont les sentines du débat d'idées.
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Et c'est bien parce que je ne me considère pas comme telle que je recherche des outils ou discours qui me feraient "grandir", qui m'enseigneraient autre chose. Un autre chose qui pourrait être: la sagesse, l'écoute, la bienveillance, la compassion, la compréhension... Soit à peu près tout ce que je n'arrive pas à cultiver en fréquentant ce genre de groupes).
Alors garde les outils, et envoie paître les "maîtres à penser"... quelle que soit l'étiquette dont ils se revendiquent.
Je réalise en lisant tes remarques qu'en fin de compte, ces défauts ne sont pas propres aux "webzététiciens" d'aujourd'hui. C'est inhérent au média qu'ils fréquentent. Nous ne sommes plus à l'heure du compromis ou du débat respectueux. C'est la guerre des idées et il faut faire taire celui qui pense différemment et l'exprime (transposé à l'histoire militaire, on a là une version intellectuelle de la bataille d'anéantissement clausewitzienne... c'est terrifiant, je trouve), quitte à le faire de manière artificielle en créant des espaces "safe" (le principe "l'alternative est féconde" a dû être oublié en route). Partant de là, je ne peux même pas reprocher aux zététiciens actuels d'avoir salopé le travail de la génération précédente (la mienne), qui avait popularisé la zététique : nous n'avons fait qu'ouvrir la boîte de Pandore, et ce qui arrive maintenant était probablement inévitable... La zététique est victime de son succès, au bout du compte.
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En conclusion: pour moi, désormais, si vérité il y a, il me semble de plus en plus évident qu'elle ne se trouve pas du côté de la science, mais qu'elle est... ailleurs. En l'occurrence, du côté de l'amour au sens le plus large du terme (amour de soi, de son prochain, etc.).
J'ai envie de te dire : tout dépend de ce que tu recherches. Il y a de la place pour tout et tout le monde, et je pense qu'une vie équilibrée a besoin des deux.

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Du coup, ces histoires de zététique finissent par me paraître un brin chimériques et dérisoires.
Elles ne le sont pas. C'est notre société qui l'est. Et qu'est-ce que les réseaux sociaux, sinon le reflet peu flatteur de ladite société ?