Tu as raison, ces rappels (auxquels je souscris) sont importants. Et je sais que Kuntz ne se revendique pas de la zététique. Au départ, j'avais tendance à mélanger les deux, mais depuis que Cortex m'a expliqué que l'AFIS n'avait qu'un très vague lien avec l'Observatoire zététique (je prends ici l'exemple de cette association précisément, puisque c'est d'elle dont Cortex parlait à ce moment-là), j'ai compris qu'il ne fallait pas tout mélanger.
Si je poste ici, c'est tout simplement parce que je ne me voyais pas ouvrir un topic spécifiquement pour ce papier de Kuntz, et parce qu'il me semble que cela prolonge bien toutes nos discussions sur ce fil.
Par ailleurs, on peut quand même noter que des gens comme Sastre et Bronner (peut-être même Kuntz - qui est encore dans un autre registre, tu as raison - je ne sais pas, il faudrait vérifier?) sont quand même assez souvent sollicités par la communauté webzététicienne car considérés pertinents sur pas mal de sujets. Ce que je veux dire, c'est que s'il ne faut pas, en effet, tout mélanger, les frontières sont tout de même poreuses parfois. Et ce n'est probablement pas tout à fait le fruit du hasard (comme on se l'est déjà dit, du reste).
Citer:
Or, il y a bel et bien une minorité de sociologues complètement relativistes, qui considèrent que la méthode scientifique n'est pas plus valable que l'astrologie par exemple pour comprendre le monde (Maffessoli en est un bon exemple). Il y a bel et bien une poignée de vrais SJW, c'est-à-dire des militants intersectionnels haineux qui exigent une pureté militante parfaite du reste du monde (un standard qu'ils ne sont pas capables d'appliquer à eux mêmes, d'ailleurs). On croise parfois des féministes authentiquement misandres. On tombe occasionnellement sur une vraie forme de bien-pensance, avec des sujets tabous impossibles à aborder (essayez de parler d'immigration de façon calme et rationnelle dans une assemblée d'extrême gauche, pour voir : grosso-modo, si vous n'êtes pas no-border, alors vous êtes forcément racistes). Etc.
Je suis d'accord, là aussi. J'en ai été témoin plusieurs fois. Et, de fait, je me questionne depuis plusieurs mois sur la frontière qu'il conviendrait d’appliquer pour séparer les authentiques "relativistes", "féministes misandres" et autres "militants haineux" des discours plus "raisonnés".
Je veux dire, par exemple, à partir de quels critères précis et sur quelles bases concrètes décide-t-on qu'une féministe serait misandre? Si la réponse peut sembler évidente à certain-e-s, pour moi, j'avoue que ce n'est pas toujours très clair. (Ici, tu peux remplacer "féministe misandre" par n'importe quelle autre catégorie que tu as évoquée). La réponse est, à mon sens et dans tous les cas, politique. Elle concerne notre façon de voir le monde et le projet de société que l'on a envie de voir appliqué (ou pas).
Quand des arguments scientifiques sont détournés et falsifiés au service d'une idéologie, on pourrait penser qu'il y a une possibilité de rétablir un semblant de "vérité".
Mais, même là, c'est compliqué : si on reprend l'exemple de Kuntz, lui est persuadé que la discrimination des femmes dans les sciences n'existe pas et est inventée de toutes pièces, quand d'autres passent leur temps de recherche à démontrer le contraire: on voit bien ici que ce qui est en jeu au départ, c'est aussi et surtout une façon de voir le monde, et qui ne permet pas à Kuntz de voir (ou qui lui permet de faire semblant de ne pas voir, je ne sais pas) les inégalités.
Ce que je veux dire, plus basiquement, c'est que face aux mêmes problématiques ou aux au mêmes données, les méthodes de recherche et les interprétations peuvent être très diverses, et les résultats être sujets à caution de toute part. Et il me semble que, dans ce cas, seule la réponse politique est pertinente pour trancher ces questions, pas la réponse scientifique (qui peut éventuellement, et tout au plus, venir étayer en partie un point de vue à un moment
t - cela pour le meilleur comme le pire).
Je suis frustrée car je ne sais pas si je suis claire. Or, c'est là, pour moi, le cœur du problème. Il faudrait que j'illustre avec un exemple... que voici.
Lorsqu'un-e biologiste de formation décide d'étudier la question des différences hommes/femmes au prisme de sa discipline, elle ou il est parfaitement en droit de le faire. Mais on est alors d'emblée sur un terrain glissant, qui amène aux questions suivantes:
- pourquoi avoir choisi cet objet d'études en particulier?
- pourquoi le prisme biologique a-t-il semblé pertinent aux auteur-e-s? (Alors que l'on pourrait aussi imaginer des chercheuses et chercheurs qui pensent que leur discipline n'a finalement pas grand chose à dire sur le sujet. Je suis d'ailleurs certaine que c'est le cas de beaucoup);
- quel impact cela aura-t-il sur les conclusions de l'étude? Car, postuler dès le départ que ces différences (bien réelles) pourraient expliquer nombre des comportements des uns et des autres, constitue déjà un biais/un prisme de lecture bien spécifique.
Tu me suis? Et bien maintenant, il reste encore à appliquer exactement les mêmes questions aux chercheurs en sciences sociales qui bossent sur ces sujets.
Du coup, il me semble difficile, voire impossible de faire vraiment la part des choses objectivement.
De mon point-de-vue, je préfère - tu l'auras sûrement compris - vivre dans un monde ou nos comportements sont considérés, non pas comme une fatalité biologique, mais bien comme étant le produit d'une vie en société. Ce qui signifie que l'on peut toujours progresser et faire évoluer nos mentalités et nos agissements. Mais je reconnais qu'il s'agit là d'une décision de ma part, et que c'est entièrement politique. Car je n'ai pas les moyens de démontrer que la biologie ne serait pas du tout pertinente, à aucun moment, pour étudier ces questions.
Ici, tu me diras peut-être que la pluridisciplinarité et la transversalité peuvent être un début de réponse. Et bien, même là, je ne sais pas. J'avoue que je ne sais pas si j'ai vraiment envie que les sciences naturelles aient quelque chose à dire sur ces sujets...
Je me relis et je ne sais pas du tout si je suis parvenue à être un minimum claire ou si mon message est juste un affreux gloubiboulga abscons.
Mais, en conclusion, l'idée est bien celle-ci: lorsque tu catégorises une féministe comme "misandre" ou un militant comme "haineux" - et cela, encore une fois, bien que je te rejoigne - tu le fais selon des critères et valeurs qui te sont propres... mais qui peuvent (doivent) aussi sûrement être discutés.