Voici le grand 1 de ma première partie, qui s'en tient autant que possible à une version historique "orthodoxe"...
Ce n'est pas toujours simple, car en matière de tarot, chaque auteur croit avoir inventé l'eau chaude. Et autant dire que pour le reste, les influences plus "légendaires" ( genre Livre de Thot, Kabbale etc... ) et le symbolisme ben c'est pire...
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I. Une recherche historique mouvante et inachevée…
Du jeu de cartes au Tarot
Il n'existe toujours pas de consensus, loin de là, entre spécialistes quant à la naissance réelle ( où ? pour quoi ? comment ?… ) du Tarot. Tout juste des théories majoritairement acceptées.
Cela vient probablement du fait que le Tarot n’est pas apparu parfait et entier en une seule et même fois, comme le lapin du chapeau du magicien, mais qu’il est au contraire le fruit d’une réflexion progressive, de rencontres en civilisations, entre l’Orient et l’Occident, et qu’il est toujours et encore l’objet de recherches au niveau historique, certes, mais également symbolique.
Le Tarot n’est pas et n’a jamais été un objet figé, une pièce de musée sur une étagère poussiéreuse… au contraire, il a été et il est toujours objet et sujet de recherche, de questionnement et d’interprétation. Le Tarot est et à toujours été « vivant ».
D’ailleurs, on ne sait toujours pas si à sa création le Jeu de Tarot n’ait pas été « qu’un » jeu de cartes à jouer, et que son utilisation initiatique et divinatoire se soit manifestée ultérieurement.
Les premiers jeux de cartes à jouer seraient apparus – entre autres choses – au court du Vème siècle en Chine. De là, ils suivirent la Route de la Soie jusqu’au Moyen-Orient, où ils prirent le nom de « Naïbs ». Enfin, ils parvinrent en Europe, via l’Espagne Mauresque.
Dans les années 1370, les premiers jeux sont donc d’inspiration Sarrasine : les cavaliers, notamment, portent des épées à lames courbes, les cimeterres, de même que les couleurs ( coupes – ou tasses – épées, deniers et bâtons – ou maillet – ) sont une référence directe à la culture mamelouk.
Ces cartes ne comportent que des séries d’honneurs ( ou figures ) et de chiffres, analogues à celles que l’on retrouve sur nos jeux de cartes traditionnels et aux lames mineures. Les arcanes majeures, elles, sont donc d’apparition plus tardive.
On retrouve les premières références historiques de ces jeux, encore de pur divertissement, vers la fin du XIVème siècle, lorsque paraissent des décrets d’interdiction à Paris, Florence ou encore Lille, les jeux de hasard subissant à cette époque les foudres de l’Eglise.
Le jeu le plus ancien conservé à ce jour possède – ou ne possède plus que – 17 cartes. Il est appelé de « Charles VI », mais il est plus connu sous le nom de « Gringonneur » d’après le patronyme du peintre auprès duquel le Roi l’aurait commandé en 1392, comme l’atteste un état de paiement reçu par l’artiste. Mais il est presque acquis que Gringonneur s’est fortement inspiré de jeux existants déjà en Italie du Nord ( à Venise ou Ferrare ) à la même époque.
La tradition divinatoire existe, quant à elle, depuis l’Antiquité, et sans doute même avant. Les textes de Cicéron et Plutarque au Ier siècle attestent de l’existence d’une sorte de divination par le tirage de « sorts » ( des lamelles d’écorces gravées de symboles variés ) ou encore de tablettes de bois ou d’argile tirées au hasard aux abord des Temples ( notamment celui de Fortuna à Peneste ).
Le Tarot le plus proche de celui que nous connaissons aujourd’hui aurait vu le jour en Italie du Nord, alors en plein « Quattrocento » dans des villes aristocratiques et intellectuelles, telles que Bologne, Milan, Florence ou encore Ferrare, avant de prendre peu à peu le chemin des autres cours européennes, au gré des échanges commerciaux et des voyageurs.
A cette époque, le Tarot était toujours un jeu, mais il fut également dans les cours aristocratiques le support privilégié de divertissements raffinés tels que l’écriture de poèmes galants ou encore de sortes de « jeux de la vérité » et autres « portraits chinois » intellectuellement sophistiqués.
Dès la fin du XIV siècle, les prédicateurs et l’Eglise dénoncèrent le Tarot comme étant l’œuvre du Malin et conduisant l’homme au vice et à l’immoralité… ce qui n’empêcha pas le moins du monde la diffusion des jeux de Tarots à toute l’Europe, où seule l’apparition de jeux plus modernes parvint à les supplanter.
Le plus connu des jeux de tarots, ou « tarocchi » ( qui serait l’origine étymologique historiquement orthodoxe du mot « tarot » ) est le Tarot Princier dit des « Visconti-Sforza » qui date de 1447. Il a été crée par le peintre Bonifacio Bembo à l’occasion du mariage du Duc de Milan Francisco Sforza et de Bianca Maria Visconti.
Il se compose de 78 cartes, et non plus 54 ou 56 comme les premiers jeux à jouer. Son iconographie riche et la finesse de ses dorures expliquent probablement qu’il soit encore réédité de nos jours.
C’est sans doute vers cette époque que la vingtaine ( leur nombre n’est pas encore fixé… ou connu précisément ) de lames majeurs, les « Triomfi » ou « triomphes » s’ajoutent aux cartes ordinaires, sans que l’on sache encore aujourd’hui avec certitude pour quelle raison.
On ne sait pas non plus si c’est ce qui a fait passer le Tarot de simple divertissement à mancie ou chemin initiatique.
Le tarot des Visconti-Sforza a été offert selon toutes probabilités en tant qu’objet d’art et jeu d’argent, mais quelques 150 ans plus tard, en 1589, on retrouve à Venise les minutes d’un procès qui suggèrent – au moins dans l’esprit des accusateurs – une association entre Tarot et Sorcellerie.
Et après cela, plus rien.
Il faudra attendre l’avènement des ésotéristes occidentaux ( Rose-Croix, Kabbalistes, Francs-Maçons et autres Martinistes ) à la fin du XVIIIème siècle pour que le Tarot prenne enfin sa dimension initiatique et divinatoire qui nous fascine encore aujourd’hui.
En France, la plus ancienne référence au Tarot se retrouve en 1534 chez Rabelais, dans son Gargantua, sous la forme du jeu de « tarau » pratiqué par le jeune géant.
A cette époque, les jeux de cartes français sont surtout imprimés à Lyon ( jeu de Catelin Geoffroy en 1557 ) et Paris.
En 1650, le jeu de tarot prend peu à peu la forme que nous connaissons avec le Tarot de Jean Noblet en 1650, bien que le Tarot ancien le plus proche de notre Tarot divinatoire actuel serait celui de François Chosson publié en 1672. Il en existeraient de plus ancien remontant jusqu’à 1608, mais il n’en subsiste aucune trace à ce jour.
Durant tous les XVIIème et XVIIIème siècles, de nouveaux tarots, très proches de ceux de Noblet et Chosson sont publiés un peu partout en France à Chambéry, Avignon ( Tarot de Payen 1713 ), Besançon ou encore Epinal. Ils sont d’ailleurs pour certains de nouveau imprimés aujourd’hui et font la joie des tarologues amateurs et des collectionneurs.
Mais c’est bien sûr à Marseille que naît en 1760 le tarot de Nicolas Conver, celui qui deviendra et qui reste encore à ce jour la référence en matière de Tarot et qui est pour ainsi dire mondialement connu sous le nom de « Tarot de Marseille ».
Et là encore, bien malin qui pourrait dire si ce jeu avait déjà acquis lors de sa création sa dimension ésotérique et divinatoire.
Donc voilà... j'ai essayé de rester claire et didactique autant que possible, ce qui fait que j'ai parfois un peu l'impression de radoter.
Pareil, si vous avez un truc à dire, une question n'importe quoi, n'hésitez pas, c'est le moment.