Comme en ce moment on à l'impression de nager en pleine dystopie (mélangé au
Muppet show, en tout en ce qui concerne la politique française...

)... j'ai trouvé intéressant, après avoir vu les deux films, de faire un petit parallèle entre deux dystopies récentes, qui, en un sens, sont une charge contre l'Amérique de Trump, mais aussi, finalement, contre la petite musique néo-crypto-fascisante et réactionnaire qui monte un peu partout...
Bref, j'ai donc vu dernièrement
Une bataille après l'autre et
Marche ou crève... deux finalement très bons films selon moi. Dans des genres et des formes très opposés, mais qui, finalement, semblent se refléter, comme deux faces d'un même prisme.
Là où
Une bataille après l'autre joue la carte d'un cynisme sophistiqué et qui fait souvent mouche (il faut le dire, certaines scènes sont vraiment très drôles), en mettant en scène des anti-héros largués dans une révolution et des ambitions qui les dépassent : DiCaprio est juste impeccable dans le rôle d'un père ex-révolutionnaire largué mais plein de bonnes intentions, près à tout pour sauver sa fille, et Sean Penn réussi le tour de force de transformer un personnage de militaire bas du front plein de ridicule en un antagoniste flippant et malaisant à souhait. Vraiment, personne n'est à sauver dans cette histoire, hormis peut-être la jeunesse (et donc la fille du personnage de DiCaprio, qui est vraiment la seule personne qui n'est pas à côté de la plaque

)...
Bref, c'est un brûlot, teinté d'ironie avec beaucoup de second degré. Et dont la maîtrise technique et intellectuelle et l'esthétique léchée devrait lui ramené quelques statuettes aux prochains Oscars.
A l'inverse,
Marche ou Crève est totalement premier degré. J'ai trouvé que la réalisation était très sobre, voir simple, mais que justement elle servait totalement le propos, rendant l'histoire d'autant plus poignante et prenante. Via des caméras à l'épaule, au milieu du groupe, on marche à côté des héros. Et j'ai envie de dire qu'on crève aussi à côté d'eux. Ils sont tous bouleversants, tous les jeunes acteurs sont bouleversants de sincérité (bon, petite mention au héros Cooper Hoffman, fils du regretté Philip Seymour, qui a de qui tenir décidément...).
Contrairement à la critique de Télérama, je n'ai pas du tout trouvé que le film se complaisait dans la violence (je pense que le critique en question n'a jamais vu un film qui se complaisait dans la violence...

). Oui, c'est violent. Et oui, ça saigne et parfois ça tâche. Parce que ça montre les choses comme elles sont. Mais ça n'en fait pas trop. La violence, la cruauté sont la violence et la cruauté, point. Il n'y a rien à rajouter ni à édulcorer, pas d'effet de manche pour styliser. Les choses sont ce qu'elles sont, livrées toutes crues et toutes brutes.
Et je trouve que justement, c'est servir l'histoire de King, qui se veut là encore, une charge anti-fascite, et une histoire qui met en avant la fraternité, l'amitié, la solidarité face à un pouvoir politique totalitaire, brutal et cruel.
Après le discours du secrétaire d'Etat aux armées (qui, en gros, veut une armée de guerriers, et virer les "wokes et les gros" sic

), le discours du commandant (incroyable Marc Hamill dans un total contre-emploi) raisonne d'une manière incroyablement pertinente. Et rend cette histoire incroyablement pertinente. Et prend vraiment aux trippes.
Mais au final, j'ai trouvé que le message restait le même : face à pouvoir totalitaire, violent, inhumain... la réponse est de ne jamais entrer dans le jeu de la "loi du plus fort", mais de garder notre humanité. De répondre par l'humanisme, la fraternité, l'amitié, l'amour filial, l'amour tout court. Moi je trouve ça très christique et ça me parle totalement...
Bref, finalement, l'un parlera plus à l'intellect, tandis que l'autre parlera au cœur.
Et ça ne veut pas dire, d'ailleurs, que l'un est moins bon que l'autre d'ailleurs... mais j'ai constaté qu'en terme de critiques, certains ont eu la dent plus dure sur le second. A croire que pour plaire à certains milieux intellectuels, il faut être cynique et jouer d'une certaine moquerie (fut elle réussie et sophistiquée), mais la simplicité et l'authenticité dans le propos paie moins.
Personnellement, je trouve ça un peu dommage, parce qu'il n'y a pas, à mon sens, qu'une bonne manière de raconter les bonnes histoires.