Chimère a écrit:
Alors, je ne sais pas exactement comme ça s'appelle cette manip' (j'ai quasi arrêté les maths en seconde, moi...
), tu mets ton image dans un quadrillage et tu bidouilles pour que les cases soient carrées et normalement, ça fait un crâne.
Valà.
Bon allez : tu es tellement prêt de la bonne réponse que je ne vais pas faire durer plus longtemps l'énigme (j'aurais dû prendre une reproduction plus petite, ce qui aurait rendu la vision du crâne beaucoup moins évidente !).
Ce célébrissime tableau s'appelle "Les ambassadeurs" et a été peint par Holbein en 1533. Il doit sa réputation, entre autres raisons, pour contenir, au premier plan, une des plus spectaculaires
anamorphoses de l'histoire de la peinture : une forme évoquant un os de seiche se révélant, depuis un point de vue oblique, être un crâne humain, caractéristique des "vanités" de la Renaissance. Pour mémoire, l'anamorphose désigne toute déformation réversible d'une image à l'aide d'un système optique — par exemple un miroir courbe — ou une transformation mathématique.
Lire à ce sujet, la passionnante et érudite notice de Wikipédia consacrée à ce tableau, qui mériterait en fait à lui seul tout un bouquin :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Ambas ... ychanalysePour voir le crâne non déformé, il faut le regarder sous une incidence oblique :
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/3/34/Holbein_Ambassadors_anamorphosis.jpg/74px-Holbein_Ambassadors_anamorphosis.jpgOn peut aussi utiliser le dos d'une petite cuillère en guise de miroir, placée ainsi :
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/5/52/Holbein_spoon_trick.jpg/255px-Holbein_spoon_trick.jpgExtrait de la fiche Wikipedia :
[b]"Le crâne en anamorphose[/b]
"L'étrange figure qui se trouve au premier plan, qui ressemble pour certains à un os de seiche, est un crâne fortement déformé par une anamorphose. Ce type de déformation était à la mode dans l'Angleterre des Tudors. La National Portrait Gallery de Londres possède d'ailleurs un portrait d'Édouard VI d'Angleterre par William Scrots45 qui utilise ce principe.
Le tableau suppose donc deux points de vue différents, le premier, de face, pour admirer la calme splendeur des deux ambassadeurs, et le second, à sa gauche, en vision rasante, pour voir émerger le crâne — ces deux points de vue s'excluant mutuellement, et chacun effaçant l'autre vision de l'œuvre. Jurgis Baltrušaitis imagine donc, de la part de Jean de Dinteville, une véritable mise en scène pour son château de Polisy :
« Le Mystère des Deux Ambassadeurs est en deux actes. L’installation de la peinture dans une maison devait répondre à des prescriptions précises : pour que l’effet de son dispositif fût efficace, il fallait le mettre en bas du mur, au ras ou légèrement au-dessus du sol qui paraissait prolongé dans le tableau. Dans le château de Polisy, dont la reconstruction commença en 1544, elle fut sans doute placée par Dinteville dans une vaste salle, en face d’une porte et près d’une autre sortie, chacune des deux issues correspondant à l’un des deux points de vue. Imaginons une pièce avec une entrée d’un côté, au milieu, et deux portes latérales de l’autre, le cadre installé entre les deux, dans l’axe. Le premier acte se joue lorsque le spectateur entre par la porte principale et se trouve à une certaine distance, devant les deux seigneurs, apparaissant au fond comme sur une scène. Il est émerveillé par leur allure et par la somptuosité de l’apparat, par la réalité intense de la figuration. Un seul point troublant : l’étrange corps au pied des personnages. Le visiteur avance pour voir les choses de près. Le caractère physique et matériel de la vision se retrouve encore accru lorsqu’on s’en approche, mais l’objet singulier n’en est que plus indéchiffrable. Déconcerté, le visiteur se retire par la porte de droite, la seule ouverte, c’est le deuxième acte. En s’engageant dans le salon voisin, il tourne la tête pour jeter un dernier regard sur le tableau et c’est alors qu’il comprend tout : le rétrécissement visuel fait disparaître complètement la scène et apparaître la figure cachée. Au lieu de la splendeur humaine, il voit le crâne. Les personnages et tout leur attirail scientifique s’évanouissent et à leur place surgit le signe de la fin. La pièce est terminée. »Et voilà le fin mot de toute cette histoire. J'espère que vous l'avez trouvée intéressante. Et à toi de jouer, Chimère !