Vu La Forme de l'Eau cet après-midi.

Guillermo del Toro n'est pas tombé dans l'écueil de faire une redite pour adulte de Sauver Willy comme je le craignais, principalement parce qu'il a axé son film sur la relation entre Elisa et l'homme amphibien plutôt que sur l'évasion de ce dernier.
On retrouve la patte typique du réalisateur, notamment dans le méchant (incarné par Michael Shannon, dont je n'arrive pas à dire s'il cabotine à mort ou s'il campe un psychopathe crédible). Mais Del Toro s'est essayé à d'autres choses, notamment dans l'atmosphère qui évoque plus ou moins un film de J-P Jeunet (période La Cité des Enfants Perdus, ce qui explique les accusations de plagiat que ce dernier a formulé à l'égard de La Forme de l'Eau).

Quoi qu'il en soit... Je l'ai bien aimé, mais je le trouve quand même moins bon que Le Labyrinthe de Pan ou l'Echine du Diable, qui me semblent plus aboutis et avoir davantage de degrés de lecture.

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Close the world, open the next

Ah moi j'ai justement trouvé qu'il y avait pas mal de degré de lecture, notamment d'un point de vue social... sur le fait qu'au final, ceux qui veulent faire ce qui est juste n'appartiennent pas forcément au même "camp" au départ, et une ode à la non-conformité, aux sans voix qui retrouvent un moyen d'expression et de dépassement à travers leurs rêves et la force de les vivre. Quelque part, cette dimension est même carrément politique.
Et si on regarde ceux qui s'allient pour sauver la Créature, nous avons une muette (donc une handicapée), une noire, un vieux garçon gay, et un "ennemi" (je vais essayé de ne pas trop en dire... ), à l'inverse, le bon "héros" américain, qui a fait la guerre, qui a une famille bien comme il faut et lit des bouquins sur la psychologie positive, c'est lui le véritable monstre dans l'histoire (pour ma part, je n'ai pas trouvé que Shannon cabotinait, je pense qu'il était dans le personnage effectivement de psychopathe, mais de psychopathe un peu pathétique, qui perd totalement pied, et que ça laideur moral pourrit littéralement )...

L'Eau, par nature, est un élément éminemment chargé symboliquement... c'est aussi bien la vie que la mort, c'est l'élément des rêves et des sentiments, c'est l'eau du baptême (d'ailleurs, Première ose un parallèle entre la Créature et la figure du Christ... au fond, il y a effectivement un peu de ça)... D'ailleurs, la fin du film peut être vue aussi d'un point de vue initiatique.

D'ailleurs, toute la critique de Première est franchement intéressante, notamment en replaçant le film dans le contexte actuel :

Effectivement, l'époque est celle de l'American Way of Life, sensée être une époque bénie... alors qu'elle était éminemment raciste (on le voit notamment dans les rappels sur les émeutes raciales), sexiste (le personnage de Strickland est franchement misogyne, mais ses pairs ont l'air d'y voir surtout la marque d'un homme de tête et d'action), belliqueuse et matérialiste (la réussite basée sur la voiture, la pub etc...).

Au fond, comme dans Le Labyrinthe de Pan (je peux comprendre que La forme de l'Eau soit considéré comme un peu moins bon, pour moi, c'est surtout 2 contextes différents, et aussi que Le Labyrinthe est peut-être un chef d'oeuvre assez indépassable... ), pour échapper à ce monde fait pour les "forts" par les "forts", les plus petits, les différents, les "autres" quoi n'ont plus que le rêve (d'où l'ode au cinéma, aux comédies musicales et à Shirley Temple) pour y échapper, et trouver la force de se rebeller.

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Même si on ne nous laisse qu'une ruelle exiguë à arpenter, au-dessus d'elle il y aura toujours le ciel tout entier.
Etty Hillesum, Une vie bouleversée

Moi, Tonya

Après Three Billboards, Moi,Tonya démontre - s'il en était besoin - la très belle vitalité du ciné indépendant américain...
Avec une réalisation très rythmée, à la fois inventive et tonique, au suspens presque aussi intense que pour un thriller, l'australien Craig Gillespie (dont les faits d'armes étaient jusqu'à présent estampillés Disney), conte une histoire purement américaine : celle de Tonya Harding, patineuse star des années 90 (je me rappelle effectivement de l'agression de Nancy Kerrigan à la télé quand j'étais gamine, là j'ai redécouvert l'histoire)...

Loin d'être une jolie ballerine, Tonya est véritablement une guerrière qui s'est battue toute sa vie, entre une mère maltraitante et cynique, une relation compliquée et violente avec son ex-mari Jeff, et finalement contre un système qui lui reprochait finalement surtout ce qu'elle était : une redneck pas toujours bien dégrossie, grande gueule, qui ne se laissait pas faire, mais qui fini par être attachante, parce qu'elle ne lâche jamais rien. Même si elle l'a parfois payé cher, et que les médias se sont comportés avec elle comme des vautours...
Dans le rôle titre, Margot Robbie est impressionnante de charisme et rage rentrée.

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Même si on ne nous laisse qu'une ruelle exiguë à arpenter, au-dessus d'elle il y aura toujours le ciel tout entier.
Etty Hillesum, Une vie bouleversée

Lady Bird

Un petit bonbon tout à fait charmant, avec quelques petits pointes d'acidité mais jamais de cynisme, et une réalisation lumineuse et douce.
Dans le rôle titre, Saoirse Ronan incarne à la perfection une ado qui se cherche, à la fois décalée, drôle, émouvante, parfois tête à claques mais toujours attachante.
Bref, un joli regard sur l'adolescence, qui serait un peu dans la lignée de BoyHood...

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Même si on ne nous laisse qu'une ruelle exiguë à arpenter, au-dessus d'elle il y aura toujours le ciel tout entier.
Etty Hillesum, Une vie bouleversée

Tu aimes tous les films que tu vois au cinéma, Chimère ?

Serendipity (*) : il y a quelques jours je pense au ... hum... film américain sur les mathématiciennes qui ont bossé pour la NASA... zut, le titre ???? Faudra que je vérifie ici... Et paf ! Je tombe sur le DVD en faisant des courses hier ! YAY !!!!!!

(*) équivalent en français ? 'Concours de circonstances' ? 'Le hasard fait bien les choses' ?

PS ah oui. Faut que j'appelle ma soeur pour lui rappeler de récupérer ses fartébongu de Cineday pour qu'on puisse aller voir La Forme de l'Eau aujourd'hui...!
PS2 évidemment, oublié, pas le temps... J'irai toute seule !

Globalement oui... Je suis bon public, et j'ai des goûts assez éclectiques, même si j'ai une plus forte attirance pour le cinéma de genre, quand c'est bien fait, je peux aimer à peu près tout, parce qu'en soit, j'aime le cinéma en général.
Après, je peux ne pas aimer un film, mais c'est souvent parce que je n'ai pas choisi le film et que j'ai suivi un groupe quoi.

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Même si on ne nous laisse qu'une ruelle exiguë à arpenter, au-dessus d'elle il y aura toujours le ciel tout entier.
Etty Hillesum, Une vie bouleversée

@DragoMath : Sérendipité. Je l'ai trouvé ainsi écrit dans de nombreux ouvrages. La preuve : il n'est même pas souligné en rouge lorsque je l'écris. Sérendipité.

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« C'est une paralysie du sommeil. Ou bien un orbe. » (vieille sagesse zététique).

Merci Pochel !
Quelqu'un peut-il m'expliquer pourquoi ce mot est si joli en anglais et moche en français ? Ou c'est moi qui suis trombée du cigare ?

Chimère : c'est ce que je pensais... ;>
Bon, moi je suis de moins en moins bon public... Je m'inquiète.
Vu Les Figures de l'Ombre hier soir : déçue. J'ai trouvé ça laborieux et brouillon.

Et ces derniers jours j'ai revu tous les Star Wars, que j'ador(?) ... et j'ai trouvé ça pénible : des dialogues de m*rde, des intrigues bancales, de l'humour de potache, des effets spéciaux arrogants (I, II et III) ou faiblards (IV, V et VI)... Et toujours les bruits de moteur et explosions dans l'espace...
Petite exception pour le IV, qui garde quand même son aura de pionnier, mais le reste...
L'impression globale qui me reste : il suffirait de pas grand-chose pour rectifier le tir. Revoir les dialogues - virer les petites scènes d'humour à la c*n (l'animal qui lâche une caisse pendant la préparation des podraces dans le I... à quoi ça sert ???) - expliquer mieux pourquoi les Jedi n'ont rien vu venir dans le II et le III (Darth Sidious est particulièrement bon en manipulation d'esprits, par exemple ?) alors que ça crève les yeux - des petits trucs par-ci par-là...!
Finalement, ce que je préfère dans mes DVD Star Wars, c'est... L'Empire des Rêves, le documentaire ( de 2h10mn...!) qui retrace l'historique de la trilogie originale. C'est tout à fait passionnant, et on apprend plein de trucs sur l'art du cinéma !

Il ne faudrait jamais revoir les films que l'on a aimé il y a trop longtemps... la redécouverte est souvent décevante !...

Sinon : la bataille finale du I semble se dérouler entièrement sur la colline verdoyante qui sert de fond d'écran aux ordinateurs tournant sous Windows 95 ; celle du II est beaucoup trop longue ; le V se traîne... il y a beaucoup à dire, mais c'est dans tous les films comme ça

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« C'est une paralysie du sommeil. Ou bien un orbe. » (vieille sagesse zététique).

Jsais pas en fait...
Je pense qu'il y a effectivement toujours un décalage entre le souvenir que l'on a (surtout quand on a vu et aimé le film en question en étant enfant), mais en même temps, je pense que l'on peut toujours se laisser embarquer, si on a gardé, au moins un peu, son âme d'enfant...
Après, pour les effets spéciaux... je pense aussi que notre œil s'est habitué à des FX de plus en plus parfaits, à la HD etc... et donc, forcément, quand un film commence à dater (et même de plus en plus rapidement), ça nous perturbe et déstabilise notre regard...
C'est un peu comme reprocher à un film en noir et blanc des années 50 d'être... en noir et blanc...

D'ailleurs, je pense que l'on peut être déçu d'un film d'une part si on y plaque de fortes attentes a priori (c'est pour ça que je ne lis jamais trop de trucs sur un film avant de le voir, que je visionne la bande-annonce une fois mais pas 2 et que j'essaye de ne jamais rien attendre...), plus les attentes sont élevées plus la déception est forte (d'autant que par définition, comme se sont des vues de notre propre esprit, ces attentes ne seront pas définition jamais comblées... d'ailleurs, j'ai envie de dire que ça vaut pour la vie en général... ).

Et d'autre part, je pense aussi qu'il faut essayer de prendre les films comme le font les enfants : les enfants prennent les choses comme elles viennent à l'instant où elles viennent, ils ne projettent rien et restent dans l'instant. Ils savent aussi vivre sérieusement et pleinement ce qui relève du jeu : pour moi, un film, c'est un peu ça : un jeu. Ce n'est pas la réalité (surtout quand il s'agit d'un film de SF), c'est une "réalité alternative" si on veut... Peut-être que le message dit quelque chose de "notre" réalité, mais je pense qu'il ne faut pas confondre les 2 non plus...
De fait, j'accorde plus d'importance aux sensations présentes et au "sous-texte" à ce que le réal a voulu signifier et décrire, qu'à la cohérence d'un scénario, par exemple (qui m'intéresse dans la mesure où l'histoire doit être un minimum être compréhensible - et encore, je suis fan de Malick et pourtant ses histoires ne sont pas toujours très claires et volontairement déconstruites)...

Un film s'est tout de même une forme d'art, voire une oeuvre d'art commencer à décrypter le truc comme une équation mathématique ou un raisonnement scientifique, c'est un peu la mort de l'art en fait...

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Même si on ne nous laisse qu'une ruelle exiguë à arpenter, au-dessus d'elle il y aura toujours le ciel tout entier.
Etty Hillesum, Une vie bouleversée