Chimère > je comprend bien ta remarque sur la difficulté d'exprimer avec des mots les choses spirituelles de l'ordre du « transcendant », sans utiliser un vocabulaire qui ne soit connoté ou imprécis, ni faire des comparaisons douteuses. C'est un peu le même souci que d'essayer de décrire à quelqu'un la couleur 'rouge' ou le goût 'amer' : bon courage !
Mais... j'avoue ne pas trop voir le lien avec l'interview de Stéphane Allix. Il ne s'agit pas de cela ici.
Pour moi, le problème se situe dans le fait que :
- Stéphane Allix affirme de façon catégorique dans un quotidien national que la vie après la mort est une réalité démontrée ;
- corolaire du précédent, il présente comme avérés les pouvoirs des médiums (d'ailleurs, ils collaborent avec les scientifiques !) ;
- et enfin, il déclare avoir les preuves scientifiques de ce qu'il avance... mais sans jamais vraiment expliquer dans son interview quelles expérimentations il a réalisé, comment il a évité les biais/tromperies et ce qu'il obtenu ! En gros, c'est :
« faites moi confiance sur parole, tout cela est prouvé ».
J'aurais eu beaucoup moins de soucis avec cette interview si Stéphane Allix avait employé le conditionnel ou avait été plus prudent dans ses affirmations :
« nous avons fait des expériences, nous avons obtenu des résultats troublants, l'une des hypothèses explicatives est qu'il pourrait bien y avoir quelque chose après la mort ».
Maxime de Hume oblige : toute affirmation extraordinaire requiert des preuves extraordinaires... or si Allix ne peut pas fournir ses preuves dans une interview (ce qui peut se comprendre), il vaut mieux qu'il ne s'avance pas trop..
Je n'aurais eu aucun souci si Allix avait présenté les choses comme relevant de ses croyances personnelles :
« ce que j'ai pu voir et observer au cours de ma vie m'a amené à penser qu'il y a quelque chose après la mort ». OK : on a tous nos propres croyances, tu as le droit d'avoir cette vision des choses.
Mais ce n'est pas le cas ici : Allix est non seulement catégorique, mais en outre il a complètement la prétention d'évoluer dans le domaine de la Science (puisqu'il cite la physique quantique et prétend justifier ses théories avec des expériences aux protocoles rigoureux). Il n'y a donc même pas le souci d'intercompréhension lié aux différences de registres spirituel/scientifique que tu signalais dans ton premier message...
Je peux retourner la situation, pour mettre en évidence ce qui me turlupine.
Imaginons qu'un cardinal du Vatican soit longuement interviewé dans
Voici et qu'il dise avoir la preuve scientifique de l'existence du Dieu des chrétiens. Imaginons qu'il décrive longuement et comme des faits avérés le paradis et l'enfer, la façon dont le tri des âmes s'opère, le sort des bébés non baptisés, etc... Le tout avec la bienveillance des journalistes, qui à aucun moment ne cherchent à le tempérer dans ses propos (
« l'enfer et le paradis, vous êtes sûrs ? ») ou à présenter un avis contraire (
« pourtant les hindous croient en une multitude de dieux... »).
Ça serait un peu embêtant ? Ça choquerait davantage ? Pourtant ce n'est pas fondamentalement différent.
Bon, j'ai volontairement omis la situation d'un imam interrogé par Le Journal du Dimanche qui affirmerait la réalité des histoires racontées dans le Coran. Celui-là serait déchu de sa nationalité avant même que l'article ne soit publié et les médias parleraient pendant un bon mois de la compatibilité de l'Islam avec notre bel Occident si rationnel et éclairé... Chimère a écrit:
alors que, sans offenser qui que soit, plus les sciences quantiques avancent là-dessus, plus elles rejoignent certains points de vue spirituels : la réalité, en soi, est une forme d'illusion, que l'on parle de la Maya ou d'Univers holographique...).
Pour le coup, je suis d'accord avec Nemrod (quand même, regarde ce que tu m'obliges à écrire
) et avec le lien du CORTECS qu'il a posté.
C'est ce qu'on appelle du
mysticisme quantique et c'est complètement pseudo-scientifique.
Pour avoir pas mal discuté avec des physiciens bossant dans ce domaine, j'en ai surtout retenu l'idée que la physique quantique, c'était beaucoup de ça :
et pas du tout de ça :
Bref, c'était essentiellement des mathématiques pointues et pour être honnête, je n'y ai pas compris grand'chose.
Je crois que c'est un peu le souci de tous les sympathisants New-Age qui accrochent au mysticisme quantique : ils n'ont aucune formation scientifique mais ils pensent quant même comprendre la mécanique quantique.
A défaut de capter de vrais ouvrages de physique (qui sont bien au delà du niveau du
vulgum pecus), ils se basent sur des principes ultra-vulgarisés au point qu'ils en deviennent des caricatures (tel le chat de Schrödinger) qu'ils vont tordre de façon à pouvoir soutenir leurs convictions personnelles : l'illusion de la réalité, la suprématie de la conscience sur la matière, etc.
Et ils vont s'appuyer sur le fait que la mécanique quantique pose de nombreux soucis conceptuels, et est souvent contre-intuitive, pour considérer qu'elle remet en question
toute la physique conventionnelle mécaniste et déterministe (ce qui déplaît beaucoup par essence au New-Age, puisqu'une telle conception des choses laisse peu de place à l'âme et la vie après la mort).
Stéphane Allix tombe complètement dans ce travers dans son interview quand il commence à utiliser la 'caution quantique'... ce qui, là encore, montre à mon avis qu'Allix ne sait pas de quoi il parle et qu'il ne se préoccupe visiblement pas de la rigueur scientifique de ses propos.
En soit, ce n'est pas vraiment surprenant, l'INREES est assez habitué de ce genre de mysticisme. Je vous renvoie
vers ce topic, où je dénonçais un article de l'INREES qui affirmait texto que la paralysie du sommeil s'expliquait par un état modifié de la conscience permettant au cerveau d'accéder à de nouveaux champs vibratoires quantiques...
NEMROD34 a écrit:
Mais tous font le bien pour gagner quelque chose, même un bhoudiniste le fait pour améliorer son karma, pas un ne le fait sans rien en retour, pas un seul!
En tout cas, tu ne lis manifestement pas assez de bouquins consacrés au bouddhisme...
Puisque le but d'un pratiquant du bouhddisme n'est pas « juste » d'améliorer son karma pour échapper à une réincarnation désagréable en ténia, en blobfish ou en
cymothoa exigua. Le but est de sortir du cycle des réincarnations pour ne pas entretenir la souffrance - la sienne et celle des futurs êtres à venir.
Il s'agit véritablement d'un acte de compassion, donc.
Compassion qui est un principe fondamental du bouddhisme — les exemples sont tellement innombrables que je ne saurais pas par où commencer. Je pourrais par exemple parler des
quatre qualités morales du bouddhiste. Ou de certains boddhisatvas révérés du bouddhisme qui ont refusé d'atteindre le nirvana, pour pouvoir aider les êtres vivants encore prisonniers de la souffrance sur Terre.
Et le bouddhisme insiste bien sur le désintérêt et la bienveillance/compassion réelle qui doit guider les actes de charité du bouddhiste. Aider les autres par égoïsme, par peur de sa propre mort, pour se valoriser... est juste le signe qu'on est encore prisonnier de ses illusions. Et donc, qu'on est un trrrrès mauvais bouddhiste et encore loin du nirvana.
Ne dit-on pas du zazen qu'il se pratique
mushutoku (sans but ni profit), sans espoir d'obtenir quelque chose en retour ou de devenir un grand Sage, mais juste pour pratiquer zazen ?
Bref.
Je suis convaincu que c'est la même chose pour les témoins de Jéhovah : il y en a certainement qui sont de bonne foi, qui sont convaincus de la véracité de leurs croyances et qui veulent sincèrement éviter à ton âme de finir dans les feux de l'Enfer après ta mort.
Dans tous les cas, il en va des « croyants » (je mets des gros guillemets car c'est une catégorie qui ne veut pas dire grand chose, tant on peut y mettre n'importe qui) comme de n'importe quelle catégorie sociale. Il y a des gens très biens, avec le cœur sur la main et qui mettent la compassion pour leur prochain au centre de leur vie... et à coté d'eux, des égocentriques qui voient avant tout leur propre intérêt personnel.
Et c'est vrai aussi bien pour les croyants que pour les sceptiques. Donc ta remarque :
« Mais tous font le bien pour gagner quelque chose, [...], pas un ne le fait sans rien en retour, pas un seul ! »... Ben, non.