(*Disclaimer*: Je suis vraiment navrée, car je ne sais définitivement pas faire court. En conséquence de quoi, le message qui va suivre est déjà très (trop) long. Alors même que je n'y parle que de la première moitié du livre. Je propose donc de procéder par étapes afin de ne pas pondre des messages trop indigestes. Voici donc les premières remarques qui concernent les 23 premières pages écrites par T. Durand. Le reste suivra plus tard si cela vous intéresse.)Bon, je me suis attelée à la lecture du bouquin de Thomas Durand et on peut dire que ce fût rapide (au passage, si le bouquin vous intéresse, vous pouvez me faire signe).
Notez que je n’ai aucun mérite, puisque le livre — si on retire la préface et l’annexe — ne fait qu’une petite cinquantaine de pages...
C’est d’ailleurs le premier point qui m’a posé problème. 50 pages pour traiter des expériences de mort imminente – vaste sujet s’il en est - ça me paraît tout de même un peu court. Trop court pour être honnête et vraiment rigoureux, à vrai dire.
Mais, en dehors de ce premier « détail » et pour commencer par les choses plutôt positives, on peut dire qu’il y a avant tout un beau travail de vulgarisation de la part de l’auteur : le livre est très accessible et simple à lire. Je dois également préciser d'emblée que je n'y ai rien lu de scandaleux et/ou qui m'ait fondamentalement déplu.
Ensuite, d’un point de vue purement formel, si le travail d’édition n’est franchement pas brillant(*), le style de l’ouvrage est quant à lui correct et limpide, sans être très bon.
(*Rendez-vous compte : on peut noter, entre autres choses, un titre — celui des remerciements — en Comic Sans MS… ). Par ailleurs, si l’on peut également noter un bel effort de synthèse de la part de T. Durand, ce dernier point constitue pourtant, comme je le disais à l’instant, un problème en soi. Car on se demande forcément sur la base de quels critères l’auteur a fait son tri (*). La démarche n’est jamais expliquée ou explicitée. L’auteur ne nous dit rien de son cheminement, ni de la manière dont il a travaillé. Ce qui constitue là, pour moi, un second problème.
(*Par exemple, les travaux de Laureys et du Coma Science Group ne sont jamais évoqués).
Néanmoins, et dans les choses globalement positives toujours, j’ai apprécié les précautions oratoires régulièrement prises par Durand. Le ton de ce dernier ne m'a jamais paru trop péremptoire et il m'a semblé qu'il laissait la porte ouverte aux croyances des uns et des autres. L’auteur n’oublie pas non plus de rappeler à certains moments tout ce que la science méconnait sur ces sujets et c’est appréciable. Ca me semblait être le minimum et, en ce sens, le contrat est respecté.
Enfin, je dois dire que j'ai appris quelques trucs intéressants (j'y reviendrai).
Mais, pour en revenir un instant aux petites choses qui m’ont gênée, je note en premier lieu une absence de sources à des moments où je les aurais pourtant trouvées pertinentes. Par exemple, page 14, l’auteur nous dit :
Citer:
Tout d'abord des chercheurs ont montré que l'être humain a beaucoup de mal à concevoir la disparition de la personnalité de quelqu'un. Dans nos vies quotidiennes nous interagissons constamment avec autrui, et plus spécialement avec une partie d'autrui qui est invisible et immatérielle: sa personnalité. Nous ne faisons pas l'expérience directe de ce qui anime le corps physique des gens qui nous entourent.
Quand ce corps cesse de fonctionner, il nous arrive de poursuivre malgré tout une forme d'interaction avec cette partie invisible tout bonnement parce que nous ne percevons aucun changement en ce qui la concerne. Cette partie invisible pourrait très bien demeurer intacte, a priori.
Ici, au delà du fait que je ne suis pas complètement certaine d'avoir compris le propos (T. Durand parle-t-il bien des gens qui meurent lorsqu'il évoque le "corps [qui] cesse de fonctionner, [et avec lequel] il nous arrive de poursuivre malgré tout une forme d'interaction avec cette partie invisible"? Si oui, que veut-il dire précisément quand il écrit qu' "il nous arrive de poursuivre malgré tout une forme d'interaction". A quel genre d'interactions fait-il allusion? Et de quelle façon ces dernières sont sensées se manifester? etc.), je me demande surtout qui sont ces "chercheurs" dont il est fait mention et quels étaient et le sujet et le contenu précis des études en question.
Même chose lorsque l'auteur nous dit page 16 que:
Citer:
d'un point de vue général et statistique, on est capable de dire que le niveau d'angoisse existentielle est prédictif du niveau de croyance en la vie après la mort et d'adhésion à une religion. Et cela constitue une explication psychosociale partielle — mais puissante— de l'attractivité de l'idée de la vie après la mort, indépendamment de la véracité de cette croyance.
Si je peux éventuellement entendre l'argument (qui ne me paraît pas aberrant), j'aurais apprécié une note qui serait venue nous éclairer sur les statistiques en question et qui nous aurait précisé de quelle(s) étude(s) elles étaient tirées. En outre, quand on sait que pas mal d'expérienceurs déclarent ne pas faire de lien entre NDE et religion, je me demande à quel point il est pertinent d'évoquer la religion ici.
Maintenant, s'agissant des choses que j'ai apprises et qui m'ont semblé intéressantes, il y a notamment celle-ci:
Citer:
Les expérienceurs sont-ils prédisposés à vivre des expériences inhabituelles ?
Oui.
C’est la question que s’est posée Kevin Nelson de l'Université du Kentucky. Parmi les 55 expérienceurs qu’il a questionnés, 45% avaient déjà vécu une expérience hors du corps durant la phase éveil/sommeil ou sommeil/éveil. Dans le groupe témoin, ils n’étaient que 5%. Vingt-cinq d’entre eux avaient aussi connu une expérience de paralysie du sommeil, c’est-à-dire une «intrusion» de sommeil paradoxal dans une phase d'éveil.
Je l'ignorais totalement et ne me souviens pas avoir entendu des témoins raconter qu'ils étaient particulièrement sujets à ce type d'expériences avant leur NDE. Mais je reconnais que c'est là un élément important à prendre en compte pour la compréhension du phénomène (et qui irait bien dans le sens de l'explication biologique...). Toutefois, si j'admets que l'argument a de quoi faire réfléchir, comme cela m'ébranle un peu dans ma façon de voir les choses, je suis tentée d'ajouter (c'est humain, je crois) qu'il faudrait surtout lire l'étude en question pour savoir comment elle a été menée, et qu'il faudrait également savoir si d'autres études vont dans le même sens.
Parce que c'est là un autre reproche que je pourrais formuler à l'égard du bouquin: souvent, pour soutenir une idée, l'auteur ne nous donne qu'une source (et qui va évidemment dans le sens de son propos). Mais on ne sait jamais vraiment pourquoi il a choisi tel article plutôt que tel autre, ni si d'autres études auraient pu montrer des éléments contraires ou plus nuancés. En gros, ce livre ne saurait en aucun cas être exhaustif. Ce que je comprends bien et qui peut se défendre (qui peut prétendre faire un livre qui regrouperait strictement toutes les connaissances et recherches sur les NDE?). Mais c'est embettant dans la mesure où l'auteur entend trancher ces questions sur la base de ce qui est su/connu.
Par exemple, et selon cette logique, Durand se penche sur la question des invariants et déclare tout net que, non, le récit des NDE fait par Moody en 75 n'est pas un invariant. Il existerait en réalité de nombreuses variations culturelles du phénomène.
Ici, même si je reconnais que ce qu'écrit Durand est en partie vrai, je trouve qu'il élude tout de même très vite cette question et qu'il y va un peu à la truelle. Alors que, comme le soulignait Ar Soner encore récemment, on manque pourtant cruellement de données sur le sujet. J'aurais donc préféré que Durand tienne un discours plus nuancé plutôt que cette position catégorique. D'autant que l'article de Cairn que j'ai posté il y a quelques temps sur le topic consacré aux NDE, était lui-même bien plus nuancé.
Par exemple, Durand écrit:
Citer:
La revue de vie, notamment, se rencontre uniquement dans les sociétés dominées par des religions historiques. En Inde et en Thaïlande, on ne mentionne quasiment jamais le fameux tunnel et la lumière finale, éléments qui sont pourtant les plus saillants dans les EMI du monde occidental. Quand un témoin évoque une rencontre avec une ou plusieurs entités, elles correspondent généralement aux figures mythologiques propres à sa culture, comme Jésus chez les chrétiens (voir le cas d’Alex Malarkey plus bas). Dans les pays plutôt moins religieux, les rencontres ont lieu avec des proches décédés… ou parfois aussi avec des proches non décédés, c’est-à-dire bien vivants et conscients. Au Japon l’image la plus récurrente est celle d’une longue rivière.
Ici, plusieurs remarques:
1 - Premier problème: je pense qu'il aurait été bienvenu ici que Durand définisse précisément ce qu'il entend par "sociétés dominées par des religions historiques" et "pays plutôt moins religieux". Car c'est tout de même là une notion assez complexe, et qui pourrait être soumise à bien des variations. Du coup, pour comprendre vraiment le propos, il faudrait aller lire l'étude que Durand cite en note (Kellehear A. 1993. Culture, Biology, and the Near-Death Experience : A Reappraisal. The Journal of Nervous and Mental Disease. 181 : 148-156);
2 - Ensuite, pour appuyer ses dires (intéressants au demeurant) concernant le fait que les gens issus de pays "plutôt moins religieux" verraient aussi des êtres bien vivants au cours de leur NDE, l'auteur cite une étude qui date de 1986. Il précise en note : "C’est particulièrement vrai des enfants qui rencontrent plus de vivants que de morts, et parfois le Père Noël : Morse, J., P. Castillo, D. Venecia, J. Milstein, and D. C. Tyler. 1986. Childhood near-death experiences. American Journal of Diseases of Children, 140 :1110-1114."
A la lecture de cela, j'ai tout de suite envie, là encore, de demander s'il y a eu d'autres études sur la question depuis et qui iraient globalement dans le même sens. Parce que 86, ça commence tout de même à dater, et je trouve qu'il n'est pas suffisant de citer uniquement cet article pour trancher une question si compliquée.
3 - Enfin, comme déjà dit sur le topic consacré aux NDE, et même si j'ai conscience que l'argument qui va suivre n'est pas scientifique, et donc pas réfutable, on pourrait objecter ici que le fait de voir des vivants plutôt que des morts lors d'une NDE ne dit finalement rien du caractère hallucinatoire (ou non) du phénomène. On pourrait très bien imaginer que l'expérience vécue et les choses vues par les témoins sont justement les éléments qui sont le plus à même d'être compris par le sujet dans une visée spirituelle. Dans cette hypothèse, voir un vivant ou un mort n'aurait donc que peu d'importance. Or, c'est quelque chose qui n'est pas mentionné par Durand, qui semble partir de l'évidence selon laquelle: voir un vivant lors d'une NDE = preuve d'une hallucination. Si je comprends le raisonnement et que je ne le trouve pas aberrant, il peut néanmoins se discuter.
Voilà donc pour les 23 premières pages du livre
La vie après la mort? et ce que je pouvais vous en dire pour l'instant.
J'espère ne pas avoir été trop soporifique, car je ne parviens pas à évaluer vraiment l'intérêt que peut représenter pour vous le présent message. Mais je m'engage à poursuivre si cela éveille votre curiosité d'une façon ou d'une autre.
Et en attendant, je suis dispo pour échanger si vous avez des remarques/objections/questions. Je suis également preneuse de conseils (ex: si vous préférez que je fasse plus court, ou au contraire plus détaillé par moment, etc).