Metronomia a écrit:
En tout cas, je ne saisis pas l'enchainement logique entre ces deux propositions (si c'est bien l'enchainement logique que tu fais, à savoir "si x ne me revient pas à l'esprit quand quelqu'un m'en parle, alors il y a plus de chances que x ne soit jamais arrivé"?).
Il n'y a pas d'enchaînement logique, pour le coup. C'est une question sincère que je me pose sur la façon dont certains souvenirs sont stockés dans la mémoire, parfois à notre insu, et sur la façon dont il est possible de les faire ré-émerger.
Quant au fait que je suis convaincu que mon souvenir n'aurait pas pu me revenir ainsi s'il m'avait été raconté par une tierce personne, c'est essentiellement une conviction profonde (mais je pourrais tout à fait me tromper et avoir tort sur toute la ligne, hein).
Je pense que si ma soeur m'avait raconté cet évènement avant que je ne m'en rappelle, mon souvenir personnel étant tellement occulté, il aurait été plus facile et plus immédiat pour moi de me construire une représentation mentale complètement fictive de cette histoire. Et cette image mentale aurait pris la place du vrai souvenir ou se serait mêlée à lui, de sorte que je n'aurais plus réussi à faire la distinction entre ce qui relevait d'une part de ma mémoire, et d'autre part ce qui relevait de ce que j'avais imaginé à partir du récit qu'on m'en avait fait.
Déjà que sans intervention d'une tierce personne, je ne suis pas très sûr de l'authenticité complète du souvenir...
Ar Soner a écrit:
Du coup, cet exemple illustre justement parfaitement, selon moi, le propos de l'article que j'ai posté et qui est à l'origine de notre discussion. On voit bien ici à quel point la Fondation des faux souvenirs a eu un impact incroyable sur les discours et l'imaginaire des gens puisque dès que l'un d'eux évoque un souvenir d'inceste ou d'agression sexuelle revenu grâce à une thérapie, on suppute immédiatement que ça pourrait bien être un faux souvenir, alors qu'il y aurait pour moi 1000 manières d'appréhender la chose autrement qu'en adoptant d'emblée une posture de méfiance, cela avant même de connaître les détails de l'histoire, le ressenti de la victime, etc.
[...]
Alors qu'en supposant d'emblée que c'est faux, d'abord il y a de fortes chances qu'on soit dans l'erreur car il est statistiquement bien plus probable que l'histoire soit vraie plutôt que fausse
On parle toujours des souvenirs d'enfances complètement oubliés et qui reviennent dans le cadre d'une thérapie reposant sur un état modifié de conscience (hypnose) ou une reconstruction du passé avec le thérapeute, là ?
Parce que dans ce cas très précis, je n'oserais pas m'aventurer à affirmer qu'il est statistiquement bien plus probable que les souvenirs soient vrais... A défaut d'étude sérieuse sur le sujet, j'aurais même tendance à penser l'inverse : on sait très bien que l'hypnose est une technique qui, par sa nature même, rend le patient extrêmement influençable et qui est un source inépuisable de faux souvenirs (depuis les abductions par des extraterrestres jusqu'aux réminiscences de vies antérieures).
Toutes les conditions d'obtention des souvenirs ne sont pas égales. Un souvenir obtenu par hypnose devrait
toujours susciter la méfiance, à mon avis. Ça ne veut pas dire pour autant qu'il faut jeter le bébé avec l'eau du bain (BINGO !

) : ça mérite quand même d'être investigué, ne serait-ce que parce que même un faux souvenir peut malgré tout se baser sur un fond de vérité.
Et bien évidemment, cela ne veut pas dire qu'il faut s'asseoir sur toute forme d'empathie à l'égard de la victime présumée (qui est authentiquement secouée par ce qu'elle est en train de vivre, et ce que quelle que soit la véracité de l'accusation). Comme je l'ai déjà dit plus haut dans ce topic, la prudence intellectuelle n'exclue pas de prendre les sentiments des gens en considération.
Metronomia a écrit:
Tout cela est vraiment compliqué. J'aurais quant à moi tendance à penser que si cette personne ne remet pas ces accusations en doute, alors il n'y a aucune raison de le faire de notre côté. Car qui sommes-nous pour supposer et savoir mieux qu'elle ce qu'elle a vécu?
Personne, en vérité. Et je n'irais sûrement pas affirmer à cette personne que ces souvenirs sont faux, ne serait-ce que parce que je trouve que cela manque complètement de tact.
En revanche, de là à considérer ces souvenirs comme une description factuelle d'évènements s'étant réellement produits, et à utiliser ces souvenirs dans le cadre d'une procédure judiciaire, je trouve qu'il y a un gouffre.
Au delà de ces questions d'agressions sexuelles et sur un plan purement philosophique, la question que tu soulèves (« qui sommes-nous pour supposer et savoir mieux qu'elle ce qu'elle a vécu ? ») trouve à mon sens assez vite ses limites, et c'est particulièrement visible dans le cas des abductions ou des mémoires de vies antérieures que je mentionnais.
Si une personne me fait un récit digne des
comic books des années 60 de son enlèvement par des petits hommes verts, ou si elle me raconte sa vie passé en tant que Cléopatre avec moults détails historiquement incohérents, quand bien même elle est extrêmement sincère, je m'accorderai quand même le droit d'estimer que
pour le coup, je sais probablement mieux qu'elle-même ce qu'elle a vécu. D'ailleurs, penser le contraire me semble potentiellement un peu dangereux (sans aller jusqu'à brandir l'épouvantail du relativisme, je trouve que ce n'est pas un très bon signe en matière d'esprit critique).
Metronomia a écrit:
Et de toute façon, je pense qu'une situation où quelqu'un serait persuadé d'avoir été violé alors que ce n'est pas le cas serait le signe évident que cette personne a quoi qu'il arrive vécu des choses douloureuses et a évolué dans un environnement nuisible qui lui a fait du mal car, pour le dire autrement, je pense qu'une personne qui irait vraiment bien psychiquement et qui aurait grandi dans un environnement sain n'irait jamais imaginer un truc pareil.
Probablement, mais la question qui se pose toujours derrière est : que doit-faire la justice avec ça ?
On peut avoir des relations tendues avec ses parents ou des membres de sa famille sans qu'il n'y ait jamais rien eu de légalement répréhensible. Par exemple, un faux souvenir d'agression sexuelle pourrait reposer sur le fait que la victime a réellement subi pendant son enfance ou son adolescence des remarques sexistes ou franchement déplacées de la part de son père ou de son oncle... ce qui est bien évidemment très désagréable, mais sans commune mesure avec une agression sexuelle.
Metronomia a écrit:
Ce serait bien appréciable, en effet. D'ailleurs, je te rappelle que tu as oublié de faire tes devoirs sur le topic des bêtises. On attend toujours les photos!

C'est prévu, mais j'ai beaucoup de photos à trier, recadrer et héberger.
Sans oublier que tely avait placé la barre assez haut avec les images de sa propre rénovation, du coup je suis tenté d'attendre d'avoir des photos de la maison toute finie (avec la déco et tout), ce qui n'est pas encore tout à fait le cas à l'heure actuelle...
