Encyclopédie du paranormal - Ouija

     Ouija


Planche sur laquelle sont marqués des chiffres et des lettres, utilisée notamment pour communiquer avec les esprits


Etymologie


Le nom "ouija" a été inventé aux Etats-Unis au début du XXème siècle par Charles Kennard et Elijah Bond (cf. partie suivante "Histoire et création du oui-ja"). Il correspond à la juxtaposition du mot "oui" traduit en deux langues étrangères, le français et l'allemand (on devrait donc en toute rigueur prononcer le nom "oui-ya"). Il s'agit d'une allusion à la question traditionnellement posée en début de séance par les participants : "Esprit, es-tu là ?", dont la réponse logiquement attendue est oui.

L'un des deux inventeurs du ouija, Charles Kennard, aurait prétendu que le mot "ouija" signifiait "bonne fortune" en égyptien ancien, et que ce nom lui avait été dicté par la planche elle-même lors d'une séance. Cependant, cette affirmation a unanimement été démentie par les égyptologues.

La planche de ouija typique, telle qu'elle est commercialisée par la marque Parker Brothers. Le curseur possède en son centre une petite loupe.

Bien que le mot "ouija" soit passé dans le langage courant pour désigner ce type de dispositif, il s'agit en réalité d'une marque déposée chez Parker Brothers. Le ouija étant arrivé tardivement en France, après la Seconde Guerre Mondiale, il n'existe pas d'autre nom pour cet outil -alors qu'on pourra également parler de talking board ("planche parlante") ou de spirit board ("planche à esprit") dans les pays anglophones, dont la tradition du ouija est plus vieille.

Histoire et création du ouija


Le ouija est l'héritier des nombreuses pratiques historiques de divination qui l'ont précédé, sans qu'on puisse pour autant le relier directement à un outil en particulier.
On a cependant noté une certaine ressemblance avec :

  • les planchettes divinatoires chinoises fújī (扶乩), qui furent principalement utilisées lors de la dynastie Ming (1368-1644 ap. J.C.) avant d'être interdites par la dynastie suivante. Elles se présentaient sous la forme d'un plateau recouvert de cendres ou de sable, et d'un stylet en forme de "Y" tenu par deux personnes. L'une de ces parties était mobile, et en se déplaçant, faisait le signet tracer des symboles dans le sable. Ces symboles étaient ensuite interprétés en les faisant correspondre à des caractères de l'écriture chinoise.
    Le canon taoïste Daozang (道藏) contient quelques textes écrits au moyen de cette technique.
  • le foie de Piacenza. Datant du IIème ou IIIème siècle av. J.C., il était utilisé comme un "repère" par les haruspices ("devins") étrusques, lorsqu'ils pratiquaient l'hépatomancie -la divination dans les foies de moutons sacrifiés. Il se présente sous la forme d'une plaque de bronze en forme de foie, recouverte d'inscription en étrusque (figurant les noms de différents dieux), et ressemble de ce fait de façon plus ou moins lointaine à une planche de ouija (bien qu'il n'ait jamais été associé à un curseur mobile).
    De tels modèles de foie ont été très répandue dans l'Antiquité, chez les civilisations étrusque, romaine, mais également sumérienne et babylonienne.
Forme et transcription des inscriptions étrusques sur le foie de Placenza

Bien que certaines sources affirment qu'un outil similaire fut utilisé dans la Rome et la Grèce Antique, notamment par les pythagoriciens, il n'existe aucune trace de ouija au sens strict avant la fin du XIXème siècle. En effet ce n'est que bien plus tard, à l'époque moderne, que le ouija apparut réellement.


Le milieu du XIXème siècle connut un fort engouement pour le spiritisme, perçu comme une nouvelle science qui, pensait-on, permettrait bientôt aux hommes de communiquer avec les morts. Un très grande nombre d'outils virent le jour ; ils permettaient d'obtenir facilement des messages de l'au-delà, sans avoir obligatoirement recours à l'intervention d'un médium.

A partir des années 1870, les adeptes du spiritisme mettent au point divers systèmes mettant en jeu une aiguille désignant des lettres et des chiffres écrits sur un support. Certains de ces outils sont des bricolages plus ou moins empiriques ; on peut notamment citer le psychographe de Hudson Tuttle créé en 1880, ou le cablegraphe de George Foster Pearson datant lui de 1900. D'autres instruments (comme les spiritoscopes du professeur Robert Hare) sont eux d'une très grande complexité et visent à écarter toute possibilité de tricherie.

Le psychographe conçu par Hudson Tuttle dans les années 1880. L'appareil fonctionne comme un ouija normal, l'utilisateur posant ses doigts sur le plateau tournant.

Les curseurs de ouija existaient déjà à cette époque et étaient vendus sans support, comme de simples petits chariots servant de jouets.
Les premiers médiums attachaient également un crayon à l'extrémité de telles planchettes, puis après l'avoir fait se déplacer au dessus d'une feuille, essayaient de donner un sens aux lignes tracées.

C'est probablement vers la fin des années 1880 que le ouija sous sa forme actuelle apparut, sans qu'on puisse dire précisément qui en est l'inventeur.


Deux hommes d'affaires américains, Elijah Bond et Charles Kennard, s'approprièrent cette idée et obtinrent leur brevet le 10 février 1891 : le ouija venait officiellement d'être inventé.
Bond et Kennard ne cherchèrent cependant pas à commercialiser leur nouvelle création, et en 1892, leur société fit faillite. Deux des employés de Kennard, les frères William et Isaac Fuld, étaient cependant persuadés du potentiel commercial de l'objet. En 1901, il lancèrent chacun une petite production de planches de leur propre fabrication ; l'entreprise de William Fuld acquit cependant les droits liés au nom et à l'invention du ouija, et celui-ci finit par évincer son frère après plusieurs années de bataille légale.

Ayant été tiré de son contexte spiritiste par Bond et Kennard, le ouija n'était plus guère considéré que comme un simple jeu de société au début du XXème siècle (à la façon des "boules magiques" divinatoires actuelles, par exemple).
La médium américaine Pearl Lenore Curran eut cependant l'idée en 1912 de ré-utiliser le ouija à des fins de divinisation. Son usage se répandit petit à petit dans les cercles de spiritisme et les milieux ésotériques ; le ouija connut un franc succès à partir des années 20 et les ventes en explosèrent.
Fuld affirma par la suite avoir inventé seul le ouija, mais une étude du brevet de 1891 permit de rétablir la vérité et d'attribuer définitivement la paternité du ouija à Bond et Kennard. Fuld intenta malgré tout plusieurs procès à des entreprises vendant des produits similaires.

William Fuld mourut en 1927 et ses descendants continuèrent à produire des ouija. En 1966, son entreprise fut rachetée par l'éditeur de jeux Parker Brothers (appartenant au groupe multinational Hasbro), qui est toujours à l'heure actuelle le détenteur du brevet et du nom "ouija". Il existe cependant une multitude de marques commercialisant des ouija similaires sous un autre nom.

Description et usage


Bien qu'il se décline sous différentes formes, le principe du ouija reste toujours le même et repose sur :

  • un curseur mobile. C'est typiquement une planchette de forme triangulaire, munie d'une roue ou de petits piques. Mais à défaut, les utilisateurs ont aussi très souvent recourt à un verre posé à l'envers.
    Plus rarement, d'autres objets comme un stylo, une grosse pièce de monnaie... peuvent être utilisés avec plus ou moins de succès comme curseur.
  • un support lisse et plat sur lequel sont marqués les 26 lettres de l'alphabet, les chiffres de 0 à 9, les mots "oui" et "non", plus occasionnellement quelques signes de ponctuations (point d'exclamation et d'interrogation) et d'autres mots comme "au revoir" et "bonjour".
    Dans la presque totalité des cas, le support est une planche de bois (parfois dans un autre matériau : plastique, verre, métal...). Les utilisateurs qui n'ont pas une telle planche improvisent cependant en utilisant une table ou un guéridon, sur lequel ils placent des bouts de papier avec les lettres et les chiffres correspondants.
    Le oui-ja étant très populaire à travers le monde, et notamment en Asie, les planches étrangères s'adaptent en figurant les caractères des écritures locales plutôt que ceux de l'alphabet latin.


Une forme beaucoup plus complexe et aboutie de ouija est la ziriya : c'est une planche de très grande taille, de forme circulaire, sur laquelle sont inscrits (en plus des lettres de l'alphabet et des 10 premiers chiffres) un certain nombre de concepts, d'idées, de mots communs... classés par ordre alphabétique.
Comparé à un ouija conventionnel, la ziriya permet une gain de temps considérable et la formulation de phrases beaucoup plus fines et plus subtiles. Elle demande cependant une certaine habitude pour être manipulée avec aisance, et reste de ce fait peu répandue.

Une planche de ziriya

Lors d'une séance typique de spiritisme à l'aide d'un ouija, le curseur est posé au centre du support ; les participants mettent le bout de leurs doigts sur le curseur, puis posent des question à voix haute. Le curseur doit alors se déplacer et désigner des lettres, qui misent bout à bout forment des mots – voire des phrase, répondant ainsi aux questions posées.

Les séances se déroulent en général à plusieurs ; de deux personnes minimum jusqu'à six ou sept, le principe étant que les doigts de tous les participants puissent tenir sur le curseur.
Le ouija a toujours été perçu comme une activité de groupe ; aussi bien dans l'esprit de ses concepteurs (alors que le ouija n'était encore vu que comme un jeu de société), que pour les spiritistes et les médiums?, qui vont même jusqu'à déconseiller son usage en solitaire.

... Cependant, il est bel et bien possible d'utiliser seul le ouija. Les exemples historiques le démontrant sont nombreux :

  • certains écrivains du début du siècle s'y sont essayés, dans le but d'y puiser une nouvelle inspiration ou de se libérer des carcans des conventions littéraires (de la même façon que les surréalistes eurent recours à l'écriture automatique?).
  • des médiums? y ont recours en solitaire pour pratiquer le chanelling?, et de nombreux livres ésotériques publiés dans les années 1920 ont été écrit par le biais d'un ouija.
  • les psychiatres américains y eurent recours dans les années 60 dans le cadre de certaines thérapies : le ouija était utilisé par le patient comme un outil pour exprimer plus facilement ses pensées profondes et inconscientes.

Point de vue du spiritisme


Avec l'écriture automatique et de nos jours la TCI?, le oui-ja fait partie des principaux outils utilisés par les médiums lorsqu'ils veulent rentrer en contact avec l'au-delà.

D'après les théories du spiritisme, le ouija est un instrument permettant de communiquer avec les esprits des personnes décédées. C'est donc le «fantôme» qui manipule le curseur du ouija, directement ou bien indirectement (par le biais des participants), et qui délivre ainsi son message.

Les partisans du spiritisme insistent en général sur le danger de la pratique du oui-ja : selon les théories de cette religion, il est en effet aisé de rentrer en communication avec des esprits dit "du bas-astral". Ces esprits, dont l'évolution dans l'au-delà est encore inachevée, sont mauvais et trompeurs par nature. Ils peuvent mentir sur leur identité en se faisant passer pour l'esprit que les participants essayaient de contacter, donner de fausses réponses aux questions qu'on leur pose, tenir des propos injurieux ou menaçant...
Les personnes sensibles pourraient même se faire influencer par ces mauvais esprits, et dans le pire des cas, subir une hantise ou se faire posséder une fois la séance finie.

Pour éviter ces désagréments, les partisans du spiritisme avancent un grand nombres de recommandations à respecter... Recommandations très variables suivant les personnes et les sources.
On peut cependant en dresser une liste non-exhaustive :

  • une personne expérimentée ou un médium doit participer à la séance ;
  • les participants doivent être des gens de confiance, les personnes sceptiques ou moqueuses risquant de perturber la séance ;
  • ne jamais utiliser seul un ouija. Cette recommandation n'a pas toujours été respectée par les écrivains et médiums du début du siècle, comme on l'a vu ci-dessus ;
  • toujours rester courtois vis à vis de l'esprit, et ne pas lui poser de question qui pourraient le mettre en colère ;
  • ne pas interroger l'esprit sur la future mort de l'un des participants, ni sur le monde de l'au-delà. Cette recommandation est parfois étendue : ne pas poser à l'esprit de questions concernant Dieu ;
  • ne pas utiliser le ouija dans les cimetières ou les lieux qui ont été marqués par des morts tragiques ;
  • s'il n'est pas utilisé, le curseur ne doit pas être posé sur la planchette de ouija ;
  • à l'inverse, le curseur ne doit pas sortir de l'espace délimité par la planchette lors de la séance sous peine de libérer l'esprit ;
  • si un verre a été utilisé comme curseur, celui-ci doit être détruit à la fin de séance ;
  • lorsque l'on souhaite arrêter la séance, il faut demander poliment à l'esprit l'autorisation. La séance peut s'arrêter lorsque le curseur se positionne sur la case "good bye", qu'il s'immobilise ou qu'il effectue des petits mouvements circulaires sur lui-même.

Inversement, si le curseur va aux 4 coins de la planche, s'il effectue des mouvements en forme de "8", certaines coutumes disent qu'il est possible que l'on soit en contact avec un mauvais esprit. Il est alors conseillé de retourner la planchette et de continuer la séance ainsi.
Si la séance tourne mal, l'esprit se montrant agressif à l'égard d'un ou de plusieurs participants, il est recommandé de terminer la conversation le plus rapidement possible.

Une séance de spiritisme avec l'ancêtre du ouija : un curseur mobile muni d'un crayon, traçant des traits sur une feuille de papier.

Point de vue scientifique


Pour les sceptiques et les scientifiques, le ouija repose sur l'effet idéomoteur? : la main du (ou des) utilisateur(s) est parcourue par des micro-mouvements musculaires dont celui-ci n'a pas conscience. Ce sont ces micro-mouvements qui provoquent les déplacements du curseur du ouija.
Ce phénomène fut identifié dès le XIXème siècle, puisque certains spiritistes (dont le chimiste Robert Hare - mort en 1858) firent leur possible pour inventer des systèmes de divination écartant tout risque d'effet idéomoteur? et garantir ainsi l'authenticité des messages transmis.

Les messages délivrés par le curseur proviennent quand à eux de l'inconscient de la ou des personne(s) qui manipulent le curseur.
Dans le cas d'un unique participant, c'est l'utilisateur qui dicte, sans le réaliser, les réponses données par le ouija. Dans le cas de plusieurs participants, le processus est plus chaotique et il est probable que tous les utilisateurs participent à des degrés divers à l'élaboration des réponses, celles-ci se construisant en temps réel (au fur et à mesure que le curseur désigne les lettres).

Ces hypothèses s'appuient sur différents faits :

  • l'argument le plus pertinent a été signalé par l'illusionniste sceptique James Randi : lorsque les participants à une séance de ouija ont les yeux bandés, le curseur ne trouve plus les lettres et les messages donnés par la planche n'ont pas de sens.
  • le ouija donne rarement des bons résultats au premier coup, une personne inexpérimentée ayant de plus fortes chances d'obtenir des messages incohérents... voire de ne pas en avoir du tout.
  • les personnes sceptiques, par leur attitude dubitative, perturberaient le mécanisme de transmission inconsciente des pensées des participants... ce qui explique qu'une séance de ouija marcherait a priori mieux si elle est effectuée entre personnes convaincues de la réalité du phénomène.

Pour les sceptiques, le ouija n'est pas dangereux en tant que tel. Cependant, dans la mesure où il s'entoure souvent d'une mise en scène impressionnante, il peut avoir un effet délétère sur les personnes influençables ou à l'esprit fragile.

Autres avis et points de vue


Les autorités de la plupart des religions issues du christianisme voient le ouija d'un mauvais oeil (tout comme les théories du spiritisme), qu'ils perçoivent comme une tentative contre-nature de contacter l'au-delà. Les mouvements évangélistes mettent souvent en avant le risque de se faire posséder par des démons ou de mauvais esprits.

Le New-Age avance des idées très similaires à celles du spiritisme, à la différence près que le ouija est davantage perçu comme un moyen de communiquer avec divers êtres éthérés – comme les anges gardiens ou les "êtres de lumière". De fait, le ouija semble être moins perçu comme une activité dangereuse.

Les partisans de l'hypothèse psychique vont dans le sens des sceptiques, en affirmant que le ouija transcrit bel et bien les pensées inconscientes de son (ou ses) utilisateur(s). Cependant, ils rejettent l'explication de l'effet idéomoteur? pour expliquer les mouvements du curseur, et préfèrent l'hypothèse selon laquelle celui-ci se déplacerait par psychokinésie? exercée inconsciemment par l'esprit des participants.


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Noms alternatifs : on peut occasionnellement trouver le mot orthographié "oui-ja", bien que la marque déposée de Parker s'écrive sans tiret en un seul mot . Le ouija connaît de nombreux noms différents à travers le monde.

Traduction anglaise : Ouija, mais aussi "talking board" ou "spirit board" qui sont les noms historiques de ce type d'outil.

Date : le ouija est apparu à la fin du XIXème siècle, et fut breveté le 10 février 1891 par Elijah Bond et Charles Kennard.

Localisation : à l'origine uniquement pratiqué aux Etats-Unis, le ouija est depuis devenu populaire à travers le monde.

Liens complémentaires :

Site très complet sur les planches ouija et leur histoire
Point de vue sceptique sur le ouija, par Les Sceptiques du Québec

Catégories : O ; Ésotérisme ; Objets ; Parapsychologie
Auteur : Ar Soner
Mise en ligne : 19/09/10
Dernière modification : le 21/06/16 à 17:27