Encyclopédie du paranormal - Porphyrie

     Porphyrie


Maladie supposée expliquer le mythe du vampire


Les porphyries sont un ensemble de maladies aux manifestations très variées, résultant toutes d'un défaut dans la biosynthèse d'une substance nommée l'hème.
Une forme de porphyrie a été proposée pour expliquer le mythe du vampire et du loup-garou?, en raison de ses symptômes évoquant certaines caractéristiques des créatures. Bien que cette hypothèse explicative ait été réfutée par la suite, elle est encore régulièrement avancée par certaines sources ou sur Internet.


Description de la maladie


Les porphyries sont une famille de maladies résultant d'un trouble dans la synthèse de l'hème.
L'hème est un composant essentiel des diverses hémoprotéines du corps humain, des protéines permettant aux cellules de transporter l'oxygène nécessaire au bon fonctionnement de l'organisme. La plus connue de ces hémoprotéines est ainsi l'hémoglobine, présente dans les globules rouges du sang.
Dans le cas des porphyries, une des 8 enzymes nécessaires à la production de l'hème est manquante ou insuffisante. En conséquence, la synthèse de l'hème est diminuée et des molécules précurseuses de l'hème nommées porphyrines s'accumulent dans l'organisme, où elles altèrent le bon fonctionnement des organes.

Les porphyrines prennent une couleur violette ou pourpre quand elles sont exposées à la lumière, d'où le nom de la maladie (du grec πορφύρα porphyra signifiant « pourpre »).


Les globules rouges (érythrocytes, à droite) contiennent de l'hémoglobine ; chaque molécule d'hémoglobine (au milieu) est constituée de 4 hèmes (à gauche).
(Source : Sigma-Aldrich)

Il existe 8 types de porphyries, selon laquelle des 8 enzymes est déficiente. Les porphyries sont souvent classées en 2 familles, en fonction du lieu d'accumulation des porphyrines : porphyries hépatiques (dans le foie) et porphyries érythropoïétiques (dans la moelle épinière et les globules rouges).

Les porphyries peuvent être acquises (par exemple en cas d'exposition à des métaux lourds) et dans ce cas, elles peuvent être réversibles.
Dans le cas des porphyries héréditaires, 90% des personnes ayant hérité du gène porteur de la maladie sont des porteurs sains : c'est-à-dire qu'ils ne manifestent pas de symptômes de la porphyrie mais ils risquent de la transmettre à leurs enfants.

Les symptômes sont extrêmement divers :

  • nerveux : neuropathie (pouvant conduire jusqu'à une faiblesse musculaire voire à la paralysie d'un ou plusieurs membres) ; crises d'épilepsie ; troubles de l'humeur (anxiété, dépression) et psychoses (hallucinations).
  • viscéraux : douleurs abdominales, constipations, nausées.
  • sanguins : anémie hémolytique (quantité insuffisante de globules rouges dans le sang), hypertension.
  • cardiaques : tachycardie (fréquence anormalement élevée des battements du coeur).
  • cutanés : pigmentation de la peau (taches violacées par exemple), hypersensibilité à la lumière, peau très fragile (souvent sujette aux ampoules et égratignures).
  • enfin, des symptômes divers que hypertrichose (croissance anormalement rapide des poils et cheveux), érythrodontie (coloration rouge des dents et gencives), cirrhose et malformations de certains organes... ont également été observés.


Les 8 enzymes intervenant dans la production de l'hème, avec pour chacune le type de porphyrie correspondante en cas de déficience. Les porphyries hépatiques sont en vert, les érythropoïétiques en rouge.


Les symptômes sont variables selon le type de porphyrie : les troubles nerveux sont ainsi plus typiques des porphyries hépatiques, et les symptômes cutanés des porphyries érythropoïétiques.

Toujours selon le type de porphyrie, ces symptômes peuvent se manifester :

  • ou bien lors de crises aiguës, se produisant suite à un événement déclencheur (prise de certains médicaments, d'alcool, adoption d'un régime alimentaire faible en calories, changement hormonal...). Les crises durent plusieurs jours, mais entre ces attaques, le malade peut se remettre complètement et ne plus manifester aucun symptôme. Les crises apparaissent en général après la puberté et les femmes sont les plus touchées.
  • ou bien de façon continue dès la naissance ou la petite enfance.

La prévalence de la maladie au sein de la population est là encore très variable selon le type de porphyrie. Certaines formes sont plutôt fréquentes (porphyrie aigüe intermittente : 1 personne sur 10 000 en Europe) tandis que d'autres sont extrêmement rares (porphyrie de Doss : 7 patients connus depuis la découverte de la maladie en 1979 !).


Porphyrie et vampires


Une hypothèse explicative du vampirisme


L'hypothèse qu'une certaine forme de porphyrie, la porphyrie érythropoïétique congénitale (PEC) aurait pu donner naissance au mythe du loup-garou? a été proposée pour la première fois en 1963 par L. Illis, dans un article scientifique intitulé On Porphyria and the Aetiology of Werwolves (« Sur la porphyrie et l'étiologie des loup-garous? »). En 1973, l'écrivain pour enfants Nancy Garden reprit la théorie dans son livre Vampires mais en l'associant à la créature du même nom.
Au milieu des années 1980, le biochimiste David Dolphin exposa à nouveau la théorie dans un article scientifique (Porphyria, Vampires, and Werewolves: The Aetiology of European Metamorphosis Legends). Cet article bénéficia d'une large couverture par les médias (tel le New York Times en mai 1985), ce qui contribua à populariser l'hypothèse auprès du grand public.

Cette hypothèse repose sur la concordance entre certains symptômes (réels ou supposés) de la PEC et les caractéristiques traditionnellement attribuées aux vampires :

  • l'extrême sensibilité de la peau des malades à la lumière. En conséquence, les personnes souffrant de porphyrie sérieuse ne sortiraient que la nuit, tels des vampires.
  • l'anémie aurait pu conduire les personnes souffrant de porphyrie à boire du sang pour guérir les symptômes ;
  • l'érythrodontie et la nécrose des gencives feraient ressortir les dents comme si elles étaient plus longues et leur donneraient une couleur rouge sang ;
  • la pilosité excessive provoquée par l'hypertrichose passait traditionnellement pour un signe de vampirisme ou de lycanthropie ;
  • l'ail contiendrait des substances aggravant la porphyrie, les malades chercheraient donc à l'éviter ;
  • enfin, d'éventuelles déformations du visage pourraient donner aux personnes gravement atteintes des airs de monstre.

Critiques de l'hypothèse

L'explication selon laquelle la porphyrie serait à l'origine du mythe des vampires et loup-garous? à été réfutée dès les années 90 par des médecins et des folkloristes. Ils ont avancé que bien que semblant plausible en apparence, l'hypothèse se révèle complètement infondée quand on l'étudie avec attention :

  • les personnes atteintes de porphyrie n'ont pas soif de sang ; elles n'ont même pas la connaissance intuitive du fait qu'elles sont anémiées (ce n'est qu'à la fin du XIXème siècle que les causes de la porphyrie ont été identifiées).
    En outre, quand bien même les malades boiraient du sang, cela ne leur apporterait aucun soulagement car les enzymes nécessaires à la production de l'hème ne peuvent pas être absorbées oralement.
  • la porphyrie érythropoïétique congénitale est une maladie extrêmement rare : à l'heure actuelle, seuls 200 cas ont été diagnostiqués en Europe. Cette rareté cadre mal avec le fait que la croyance traditionnelle au vampire est répandue dans toute l'Europe. En outre, lors des « crises de vampirisme » historiques (comme celles ayant eu lieu en divers endroits d'Europe de l'Est au XIXème siècle), de très nombreux cas de vampires étaient signalés dans un même village, ce qui est hautement improbable vue la rareté de la PEC.
  • traditionnellement l'apparence des vampires variait selon les sources, mais ceux-ci étaient souvent décrits comme semblant en bonne santé (et leur cadavre ne se putréfiait pas, ce qui permettait d'identifier un vampire à coup sûr lorsque son cercueil était exhumé).


Scène du film Nosferatu (1922), qui a inventé l'idée de la vulnérabilité des vampires à la lumière du jour.

  • l'idée que les vampires ne supportent pas la lumière n'est pas présente dans les croyances traditionnelles (où les vampires sont parfois vus marchant en plein jour). Il s'agit d'une invention du film Nosferatu de Murnau, sorti en 1922, popularisée ensuite par les films d'horreurs hollywoodiens des années 30 - 40.
  • il n'existe pas de preuve démontrant l'allergie à l'ail des personnes souffrant de porphyrie.

Enfin, cette hypothèse a été critiquée par des personnes souffrant elles-mêmes de porphyrie. La porphyrie étant désormais étiquetée « maladie du vampire » dans l'esprit de beaucoup de personnes, les malades se plaignent d'être victimes de moqueries. Cette vision caricaturale de la porphyrie entraîne également une désinformation du grand public, qui développe une perception erronée des causes et symptômes réels de la maladie.


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Traduction anglaise : Porphyria

Date : la porphyrie est une maladie connue depuis l'Antiquité, mais n'a été officiellement décrite et expliquée qu'à la fin du XIXème siècle.

Bibliographie :

  • Porphyria and vampirism: another myth in the making, de Ann M. Cox (1995). Postgraduate Medical Journal n° 71.

Liens complémentaires :


Catégories : P ; Sciences ; Phénomènes
Auteur : Ar Soner
Mise en ligne : 14/08/16
Dernière modification : le 30/08/16 à 21:27