Ar Soner a écrit:
- je ne suis pas sûr que ça soit un art si difficile que cela à pratiquer.
Certes. Après, reste à voir si on évalue la qualité d'une oeuvre uniquement au prisme de la difficulté qu'il y a eu à la réaliser. Ca compte un peu, bien entendu. Mais pour ma part, c'est avant tout l'intention qui se cache derrière qui, si elle est juste, transcendera tout. En gros: pas besoin de faire compliqué. L'important est que ça tombe juste et que ça parle au plus grand nombre. Et je trouve que ce talent n'est pas donné à tout le monde.
Ar Soner a écrit:
Et c'est d'autant plus vrai que beaucoup de scénaristes et réalisateurs bossent avec de la musique, voire s'imprègnent de l'ambiance dégagée par une morceau précis pour écrire des dialogues ou pour réaliser leur storyboard.
Complètement. C'est d'ailleurs ce que fait Dolan: il écoute la musique qu'il aime et imagine les scènes de son film à partir d'elle et non le contraire. Mais après tout, pourquoi ça enlèverait quoique ce soit au résultat? Qu'importe que la musique ait été crééé pour une scène ou le contraire, ce qui compte après tout, c'est surtout l'émotion que ça suscitera chez le spectateur, non?
Ar Soner a écrit:
- dans la plupart des cas, l'alchimie dont tu parles entre le morceau et la scène du film n'est pas particulièrement là.
Sur ce point, tout est question de goûts mais pour ma part, j'ai 1000 contre-exemples en tête. Je ne sais pas si tu as vu
Melancholia, par exemple? La scène d'intro d'une dizaine de minutes sur du Wagner (
Tristan et Isolde) est... pouahhh, j'ai même pas de mots.
Dans
Drive, il n'y a qu'à voir la scène d'ouverture aussi: 12 minutes de sensations du diable. D'abord une course poursuite de 9 minutes, atrocement prenante et stressante au ryhtme palpitant et haletant de
Tick of the Clock par Chromatics. Puis, à 9'18, on enchaine sur le très connu
Night Call de Kavinsky qui finit de poser parfaitement l'ambiance et le décor. Mythique.
Et chez Dolan, des choses plus simples, qui vont droit au coeur de beaucoup. Comme par exemple cette scène culte de Mommy sur
Wonderwall d'Oasis. Tout est juste: l'intention, le ton, l'émotion.
L'avantage des morceaux connus de tous, c'est qu'ils suscitent immédiatement l'adhésion pour beaucoup. Un peu comme quand tu vas en boîte (bon, je ne vais jamais en boite et toi je ne sais pas, mais tu saisis sûrement l'idée) et que tu entends un bon vieux morceaux mythique qui finira par faire se trémousser même les timides maladifs de la soirée. Bah là, c'est un peu pareil. Ca ajoute une familiarité, une proximité à la scène qui se déroule sous tes yeux. Ca peut aussi t'évoquer en parallèle des souvenirs déjà vécus sur ce morceau... Ca peut être très intense!
Ar Soner a écrit:
les morceaux joués pourraient être remplacés par des morceaux de musique du même genre sans que le spectateur ne perçoive la différence.
Oui, il se peut bien que pas mal de morceaux puissent faire l'affaire. Mais pour moi, ça n'enlève rien au fait que c'est divinement bon quand c'est réussi. Pourquoi faudrait-il qu'il n'y ait qu'un seul morceau au monde qui puisse coller avec les images pour que ce soit remarquable? Pour faire un parallèle (sûrement bancal mais tant pis), ce n'est pas parce que dans ta vie tu peux avoir plusieurs amours que ça enlève la moindre beauté à chacune de tes relations. Bah là, pour moi, c'est un peu pareil.