Encyclopédie du paranormal - Paralysie du sommeil

     Paralysie du sommeil


Trouble du sommeil provoquant une paralysie parfois accompagnée d'hallucinations


La paralysie du sommeil est une trouble du sommeil durant lequel une personne lors de son endormissement ou de son réveil va se retrouver brièvement dans l'incapacité de parler ou de bouger. La paralysie du sommeil peut en outre s'accompagner d'hallucinations sensorielles réalistes, présentant souvent un caractère surnaturel et terrifiant.

La paralysie du sommeil est en général un trouble bénin, susceptible de se produire occasionnellement chez n'importe quel dormeur. Elle n'est considérée comme une maladie que lorsqu'elle est récurrente ou que le traumatisme qu'elle génère impacte la vie quotidienne de la personne qui en souffre.

La paralysie du sommeil serait à l'origine de certains cas de supposées hantises, voire d'abductions par des extraterrestres. Elle explique également la croyance mondialement répandue en des esprits cauquemars, qui se posent sur la poitrine des personnes endormies et les écrasent de leur poids.


Le tableau Le Cauchemar, de Heinrich Füssli


La paralysie du sommeil est un trouble distinct des terreurs nocturnes. Ces dernières correspondent davantage à des crises de panique, elles surviennent quasiment essentiellement chez les jeunes enfants et ne se manifestent jamais par une paralysie corporelle.


Description médicale


Symptômes

Guy de Maupassant a décrit une expérience typique de paralysie du sommeil dans sa nouvelle Le Horla (1886) :

« Je dors - longtemps - deux ou trois heures - puis un rêve - non - un cauchemar m'étreint. Je sens bien que je suis couché et que je dors... je le sens et je le sais... et je sens aussi que quelqu'un s'approche de moi, me regarde, me palpe, monte sur mon lit, s'agenouille sur ma poitrine, me prend le cou entre ses mains et serre... serre... de toute sa force pour m'étrangler.
Moi, je me débats, lié par cette impuissance atroce, qui nous paralyse dans les songes ; je veux crier, - je ne peux pas ; - je veux remuer, - je ne peux pas ; - j'essaie, avec des efforts affreux, en haletant, de me tourner, de rejeter cet être qui m'écrase et qui m'étouffe, - je ne peux pas !
Et soudain, je m'éveille, affolé, couvert de sueur. J'allume une bougie. Je suis seul.
Après cette crise, qui se renouvelle toutes les nuits, je dors enfin, avec calme, jusqu'à l'aurore. »


La paralysie du sommeil se produit lors de l'endormissement (on parle alors de paralysie hypnagonique) ou lors du réveil (paralysie hypnopompique).
Les crises de paralysie ont une durée de quelques secondes à quelques minutes (bien que cette durée puisse sembler beaucoup plus longue pour la personne qui en est victime), après quoi elles cessent spontanément et l'individu retrouve le contrôle de son corps.

Lors d'un épisode de paralysie du sommeil, la personne est pleinement consciente mais se trouve dans l'incapacité de réaliser le moindre mouvement, même pour crier ou demander de l'aide. Son corps est complètement paralysé, à l'exception des yeux qui peuvent éventuellement encore bouger.
La personne a également du mal à respirer et éprouve un sentiment d'écrasement et de pression sur la poitrine.


Détail du tableau La Nuit, de Ferdinand Hodler (1890)


Un des traits les plus caractéristiques de la paralysie du sommeil est qu'elle peut s'accompagner d'hallucinations, ce qui contribue à rendre l'expérience particulièrement marquante pour l'individu qui la vit.
Les hallucinations peuvent être discrètes (simples bourdonnements ou sifflement dans les oreilles), mais elles peuvent également revêtir un caractère plus effrayant, souvent la forme de la sensation d'une présence hostile ou terrifiante évoluant à proximité du dormeur. Cette présence peut se manifester par des hallucinations sonores (bruit de voix, de respiration ou de pas), tactiles (sensation de palpation à travers les draps, voire de griffure ou d'étranglement), voire visuelles (vision d'une ombre ou d'une silhouette, voire d'un monstre tournant autour du dormeur ou s'asseyant sur sa poitrine).

L'aspect que prend l'hallucination est très dépendant du substrat culturel et des croyances de la personne, et a donné naissance à une catégorie de créatures surnaturelles spécifique : les cauquemars (voir partie suivante, Explications paranormales).

Dans quelques cas, des témoins ont signalé avoir vécu des expériences extracorporelles lors d'une crise de paralysie du sommeil : une sensation de flottement, voire de projection hors du corps où les individus voient leur propre corps d'un point de vue extérieur, comme si leur conscience avait quitté son enveloppe physique.


Répartition au sein de la population

La paralysie du sommeil semble être un phénomène relativement courant et répandu, bien que sa prévalence au sein de la population soit controversée, allant de 5% à 62%. Une étude sur 200 étudiants canadiens avait montré que 21% avait déjà fait l'expérience de la paralysie du sommeil. Une autre étude avait pointé des taux de prévalence d'au moins un épisode de paralysie vécu au cours de la vie variables selon le profil des personnes interrogées : 7,6% pour la population générale, 28,3% pour un échantillon d'étudiants et 31,9% pour des patients en hôpital psychiatrique.

Certaines études laissent penser que la paralysie du sommeil toucherait davantage les femmes que les hommes. Certaines familles ou lignées sont davantage concernées que d'autres par les crises de paralysie, ce qui suggère également une composante génétique à ce trouble.

Si la majorité des individus ne font l'expérience de la paralysie du sommeil qu'une ou quelques fois au cours de leur vie, dans certains cas rares elle peut devenir chronique et se produire régulièrement (voire chaque nuit) pendant une période plus ou moins longue.
Les paralysies du sommeil chroniques peuvent avoir une durée plus longue (jusqu'à une heure) et sont fortement associées aux expériences extracorporelles.


Causes physiologiques

La paralysie du corps est un phénomène naturel se produisant chez tous les êtres humains durant certaines phases sommeil, notamment durant le sommeil paradoxal pendant lequel se déroulent les rêves. Cette paralysie empêche que la personne ne bouge, en vivant « physiquement » ses rêves, et qu'elle ne se blesse par des mouvements incontrôlés.
Lors du sommeil paradoxal, les motoneurones du tronc cérébral sont inhibés, les influx nerveux y circulant sont alors bloqués. Selon certaines hypothèses, cette inhibition s'expliquerait par un très faible taux de mélatonine, qui empêcherait la dépolarisation des neurones. Tous les muscles du corps se retrouvent donc paralysés, sauf ceux des activités métaboliques essentielles : respiration, digestion et circulation sanguine. Les muscles contrôlant les déplacements des yeux ne sont pas bloqués eux non plus - ce qui explique que la phase paradoxale du sommeil soit caractérisée par des mouvements oculaires rapides (plus connus sous le terme de REM, Rapid Eye Movement).

Des expériences réalisées par neurobiologiste Michel Jouvet en 1979 ont ainsi montré que les animaux dont certains noyaux du tronc cérébral étaient endommagés présentaient des mouvements de courses, de mastication ou de toilettage pendant leur sommeil paradoxal, puisqu'ils ne possédaient plus d'inhibition musculaire.

Cette paralysie musculaire ne doit normalement apparaître que lors de l'entrée en sommeil paradoxal et disparaître sitôt cette phase terminée. Cependant, dans certains cas, elle est décalée et empiète sur l'endormissement ou le réveil du dormeur, donnant ainsi naissance à la paralysie du sommeil.


Le tableau Le Cauchemar, de Nicolai Abraham Abildgaard (1800)


Bien que parfois associées à la paralysie du sommeil, les expériences extracorporelles semblent cependant avoir une autre cause physiologique : une altération du traitement des informations dans le cortex tempopariétal (responsable de la perception sensorielle et de la proprioception). Cette zone du cerveau s'activerait lors de certaines paralysie du sommeil, et en l'absence de mouvements du dormeur, elle produirait une sensation de flotter dans les airs.


Facteurs favorisant la maladie et traitements

Le stress, la fatigue, les rythmes de sommeil irréguliers (par exemple en cas de jetlag ou de travail à horaires alternés) semblent augmenter les chances d'avoir une crise de paralysie du sommeil.
La position supine (le fait de dormir sur le dos) est unanimement reconnu par de nombreuses traditions anciennes comme un facteur favorisant la survenue de la paralysie, ce qui a été confirmé après coup par des études scientifiques.
La dépression est une maladie connue pour générer de nombreux troubles du sommeil, dont la paralysie du sommeil, qui serait plus fréquente chez les individus dépressifs.
D'autres facteurs comme la prise d'anxiolytiques ou une lumière ambiante lors du sommeil ont aussi été évoqués.

La narcolepsie, un trouble du sommeil se manifestant par une régulation anormale du sommeil (pouvant conduire les personnes en souffrant à s'endormir brusquement sous le coup d'une trop forte émotion) est également très fortement associée à la paralysie du sommeil, à un point que la paralysie du sommeil a été pendant longtemps diagnostiquée comme un symptôme de la narcolepsie avant d'être reconnue comme un trouble distinct.


La paralysie du sommeil ne présente aucun danger pour la personne qui la vit, en dehors de l'expérience désagréable occasionnée par les hallucinations.
Dans le cas de crises chroniques, les attaques s'améliorent en général avec le temps et le dormeur arrive en à retrouver le contrôle de son corps plus rapidement et avec plus de facilité. Certains témoignages indiquent même qu'avec une certaine habitude du phénomène et en gardant son calme, le dormeur peut arriver à contrôler les hallucinations qu'il subit à la façon d'un rêve lucide ; la paralysie du sommeil cesse alors d'être une expérience traumatisante.

De manière générale, il est conseillé aux personnes souffrant de paralysie d'avoir de bonnes habitudes de sommeil : privilégier un rythme de sommeil régulier, en se couchant et se levant à des heures fixes ; faire des nuits longues et reposantes ; et dormir dans un environnement calme, sombre et confortable.
Dans les cas où la paralysie du sommeil persiste, des traitements à base d'antidépresseurs tricycliques ou ISRS sont parfois proposés, mais leur efficacité semble très variable.


Découverte et identification de la maladie


La paralysie du sommeil était probablement déjà identifiée dans les cultures mésopotamiennes, qui la décrivaient sous la forme d'un démon (alu en akkadien) ou d'un incube/succube (lillu et lilitu en akkadien, qui donnera naissance au personnage biblique apocryphe de Lilith).
Les Grecs anciens furent cependant les premiers à faire une description précise de la paralysie du sommeil, connue sous le nom d'ephialtès, tels les médecins Hippocrate (Vème siècle av. J-C), Galien, et Soranos d'Ephèse (IIème siècle ap. J-C). Ce dernier mentionnait ainsi :

« Le dormeur sent que quelqu'un est assis sur sa poitrine, ou saute sur lui soudainement, ou que quelqu'un lui grimpe dessus et l'écrase lourdement de son poids. Le souffrant sent une incapacité à se déplacer, une torpeur, et une incapacité à parler. Les tentatives pour parler ne résulte souvent que par un unique son inarticulé. [...] Ceux qui souffrent de ce mal depuis longtemps sont pâles et minces car, à cause de cette peur, ils ne peuvent plus trouver le sommeil. »

Si le peuple prêtait toujours à l'ephialtès une origine surnaturelle, les médecins grecs et romains privilégiaient une approche très rationnelle du phénomène et rejetaient toute explication superstitieuse. La paralysie du sommeil résultaient pour eux d'une forme d'épilepsie ou d'un trouble alimentaire : consommation excessive de nourriture, abus d'alcool, ingestion d'aliments non comestibles... Cette dernière explication (le trouble alimentaire comme origine à la paralysie du sommeil) était encore avancée en Europe jusqu'au XIXème siècle.

Les médecins de l'âge d'or de l'Islam s'intéressèrent aussi à la paralysie du sommeil, tel les perses Rhazes (IXème siècle ap. J-C) et Al-Akhawayni Bokhari (Xème siècle ap. J-C). Dans son Guide du débutant en médecine (Hidayat al-Muta’allemin fi al-Tibb), Al-Akhawayni décrivait le kabus (paralysie du sommeil) comme une sorte d'épilepsie et l'expliquait par la remontée de vapeurs issues de l'estomac jusqu'au cerveau.


Le tableau My dream, my bad dream de Fritz Schwimbeck (1909)

Ce n'est que plusieurs siècles plus tard que les savants occidentaux ne firent la description de la paralysie du sommeil : en 1664, le médecin hollandais Isbrand Van Diemerbroeck rapporta le témoignage détaillé d'une femme de 50 ans victime d'attaques nocturnes.

Bien que la paralysie du sommeil ait été mentionnée occasionnellement dans les ouvrages de médecine au cours du XIXêmê et du XXème siècle, voire étudiée dans de rares cas (Louis Dubosquet lui consacra une thèse en 1815), elle est restée très mal connue jusqu'à une époque récente. La plupart du temps, les médecins généralistes ne sont pas informés de son existence et ne savent pas la reconnaître lorsqu'un patient leur en fait le témoignage.
La multiplication des études scientifiques consacrées à la paralysie du sommeil à partir des années 1990 ont cependant permis de mieux comprendre ce phénomène et les causes physiologiques qui en sont à l'origine. La diffusion sur Internet d'articles consacrés au sujet ont également permis d'améliorer la connaissance que le grand public a de cette parasomnie.


Explications paranormales


La paralysie du sommeil est un trouble très répandu, qui peut toucher tous les êtres humains indépendamment de leur ethnie, de leur âge ou de leur sexe, elle est connue et identifiée dans toutes les cultures à travers le monde.
Par conséquent, le folklore et les croyances populaires ont tenté d'expliquer le phénomène, ce qui a donné naissance au mythe des cauquemars : de mauvais esprits nocturnes qui s'attaquent aux dormeurs, typiquement en se posant sur leur poitrine pour les écraser de leur poids.

La paralysie du sommeil est un parfait exemple de la façon dont un phénomène biologique est interprété et mis en forme par le substrat culturel et les croyances d'un individu. Ainsi, plusieurs études scientifiques ont montré qu'en Terre-Neuve, où la paralysie du sommeil est traditionnellement attribuée à une créature nommée old hag (« vieille sorcière »), de nombreuses personnes ayant fait l'expérience de ce trouble du sommeil témoignaient avoir vu des vieilles femmes échevelées durant leurs attaques.
Ce mécanisme « d'interprétation » culturelle des hallucinations explique que la mondialisation actuelle tende à changer l'apparence des créatures visualisées par les victimes de paralysie du sommeil. On a ainsi constaté la multiplication des témoignages décrivant des cauquemars prenant la forme de monstres issus de films d'horreur populaires.


Vision d'artiste d'une abduction nocturne par des extraterrestres, un phénomène qui pourrait s'expliquer dans certains cas par la paralysie du sommeil
(Source inconnue, image fréquemment reprise sur Internet)

Il a été avancé que les abductions nocturnes par les extraterrestres (durant laquelle des personnes témoignent avoir été immobilisées dans leur lit et entourées d'aliens de type petit gris) pourraient s'expliquer par des crises de paralysie du sommeil, car elles en rappellent les caractéristiques. En outre, des études menées sur des groupes de personnes victimes d'abductions ont montré une plus forte prévalence de la paralysie du sommeil chez ces groupes que dans la population normale.


Des réactions ou des remarques au sujet de cet article ?
Venez en parler avec les rédacteurs et autres lecteurs sur le forum.


Traduction anglaise : Sleep paralysis

Bibliographie :

  • Sleep Paralysis: Night-mares, Nocebos, and the Mind-body Connection (2011), de Shelley R. Adler. Ed. Rutgers University Press.
  • Sleep paralysis in medieval Persia – the Hidayat of Akhawayni (2012), de Samad EJ Golzari, Kazem Khodadoust et al. Neuropsychiatric Disease and Treatment, n°8.

Liens complémentaires :

Page Expériences hallucinatoires associées à la paralysie du sommeil

Articles connexes :


Catégories : P ; Canulars ; Sciences ; Phénomènes
Auteur : Ar Soner
Mise en ligne : 07/09/08
Dernière modification : le 04/03/17 à 18:27