Encyclopédie du paranormal - Puca

     Púca


Créature polymorphe du folklore irlandais


Le púca est une créature surnaturelle des contes et légendes d'Irlande. Avec la banshee et le leprechaun?, il s'agit d'un des plus célèbres et emblématiques éléments de folklore de l'île.

Le terme púca proviendrait d'un vieux mot celtique ou norrois désignant un esprit de la nature, racine partagée avec le mot anglais puck correspondant à un lutin très proche du púca irlandais. Une autre étymologie a été proposée : púca serait une déformation de l'irlandais poc, « bouc ».
En gaélique irlandais moderne, púca est toutefois le plus souvent traduit par « esprit », « fée » ou « fantôme ». On le retrouve souvent orthographié pooka, phooka, phooca...


Vision d'artiste d'un púca, représenté à la façon d'un bouc anthropomorphe.
(Source : Martin Byrne)


A l'instar du drac? français qui lui est très similaire, le púca est une créature polymorphe, dont l'apparence et le caractère varient considérablement selon les sources. Il peut être lutin?, cheval aquatique, chien des enfers?, croquemitaine?... Il est donc difficile d'en dresser un portrait définitif et exhaustif.

Dans la majorité des contes et légendes, le púca prend l'apparence d'un grand animal de couleur noire : cheval, bouc, boeuf, chien, chat, lapin... Ainsi, dans le comté de Roscommon, il est souvent décrit comme une grande chèvre à la fourrure noire et aux cornes gigantesques, tandis que dans les comtés de Waterford et de Wexford, il apparaît sous la forme d'un aigle à l'envergure démesurée.

Quelques légendes racontent que le púca peut prendre forme humaine ; il conserve cependant des oreilles ou une queue d'animal qui trahissent sa vraie nature.
Le púca peut également prendre des apparences plus monstrueuses : dans le comté de Down, le púca avait l'habitude de se manifester sous l'apparence d'un gobelin nain et difforme, auquel les paysans donnaient une petite partie de leur récolte sous peine de malheurs. Dans le comté de Laois, le púca était présenté comme un croquemitaine monstrueux.


Gravure extraite du livre Irish Fairies, Ghosts, Witches de William Butler Yeats (1889)


Le púca peut être bénéfique ou maléfique selon les situations et les légendes le mettant en scène. Il est la plupart du temps assez farceur, commettant divers tours pendables aux dépens des humains. Il avait la réputation de s'attaquer particulièrement aux personnes ivres qui rentraient chez elles tard dans la nuit.

A la fin du XIXème siècle, un garçon habitant dans les montagnes près de Killarney confiait au folkloriste Thomas Croker qu'aux dires des personnes âgées, les púca étaient très nombreux dans l'ancien temps. Ils étaient malfaisants et se présentaient aux humains sous la forme de poulains sauvages à la robe noire ; ils prenaient un malin plaisir à jouer des tours aux voyageurs surpris par la nuit.
Lorsque le púca prend la forme d'un poulain ou d'un poney, il s'approche des humains tel un animal apprivoisé et les incite à grimper sur son dos. Une fois le cavalier monté, le púca part au triple galop dans une course folle à travers les champs et la lande. Après plusieurs heures de course, le púca jette son infortuné cavalier dans un trou de boue ou une mare.
Cette description du púca le rapproche du kelpie écossais et de l'archétype du cheval aquatique répandu à travers toute l'Europe.

Quand les mûres sauvages commençaient à devenir trop vieilles et impropres à la consommation, les parents dissuadaient leurs enfants de les manger en racontant que les púca les avaient souillées en crachant ou en déféquant dessus.


Les histoires décrivant le púca comme un grand chien noir le rapprochent de la croyance des chiens fantômes?, jadis très répandue dans l'archipel britannique. Dans ce cas, le púca est maléfique et le croiser pendant la nuit est un très mauvais présage.
Quelques légendes, plus rares, décrivent le púca comme une créature mangeuse d'hommes ou attrapant les enfants pour leur sucer le sang.


Certaines versions du púca le dépeignent comme une sorte de chien fantôme? annonciateur de malheurs
(Source : Illustration de Sydney Paget pour Le chien des Baskerville de Conan Doyle)


A l'inverse, de nombreux autres contes présentent le púca comme une créature plutôt bénéfique, prête à aider les paysans et marins pour peu qu'en échange elle soit respectée et bien traitée.

Un conte collecté au XIXème siècle par la folkloriste Lady Wilde décrit ainsi comment un jeune fermier nommé Phadrig qui gardait ses vaches au champ, sentit un jour une présence invisible passer à côté de lui tel un coup de vent. Devinant qu'il s'agissait d'un púca, il appela la créature en lui proposant son manteau si elle voulait bien se manifester. Un jeune taureau se présenta alors devant Phadrig ; l'animal conseilla au jeune homme de se présenter le soir-même au vieux moulin.
Phadrig se rendit au moulin comme convenu, mais n'y voyant rien ni personne, il s'endormit. Le lendemain au réveil, le paysan trouva devant lui des sacs de grain moulus comme par magie ! La même chose se répétant plusieurs nuits de suite, Phadrig finit par se cacher dans une malle et il put observer que c'était le púca — sous la forme d'un vieil homme mais portant toujours le manteau que Phadrig lui avait offert — qui moulait ainsi le grain chaque nuit.
Grâce au travail accompli par le púca, la fortune de Phadrig crût rapidement. Souhaitant remercier le púca pour le travail accompli, le jeune homme lui offrit un beau manteau de soie. Lorsque le púca eut testé le manteau, il se trouva si belle allure... qu'il décida de ne plus continuer à moudre du grain et quitta le moulin pour montrer au monde ses beaux vêtements !
Malgré le départ du púca, la fortune amassée par Phadrig lui permit de devenir un riche gentilhomme cultivé et de faire un beau mariage. Pendant la cérémonie, Phadrig reçut un beau gobelet en or : un dernier cadeau du púca.


Dans certains régions irlandaises, le púca se manifestait sous la forme d'un beau cheval apparaissant au sommet des collines et montagnes le premier jour du mois de Novembre. Parlant avec une voix humaine, le púca pouvait prédire le futur et répondre aux questions des gens sur l'année à venir, en échange de présents et offrandes.

Le púca peut aussi jouer un rôle d'intermédiaire entre les humains et d'autres esprits surnaturels irlandais. Ainsi dans le conte an piobaire agus an púca (« le piper et le púca »), un joueur de cornemuse peu doué est capturé par un púca, qui le jette sur son dos et l'emmène dans une course folle à travers la campagne. Le púca dépose finalement le musicien au sommet du mont Croagh Patric, où se tient l'assemblée des banshees. Après avoir diverti les fées, le joueur de cornemuse est ramené chez lui par le púca — les poches pleines d'or et avec désormais un talent hors du commun pour la musique.


Le château de Carrigaphooca dans le comté de Cork, ainsi appelé car localisé sur un rocher connu sous le nom de « pierre du púca »


De nombreux lieux et toponymes en Irlande portent la marque du púca : une célèbre cascade sur la rivière Liffey dans le comté de Kildare porte le nom de Poll an Phúca (« le trou du púca ») ; dans le comté de Cork près de Macroom, un château est construit sur un lieu-dit nommé Carraig a' Phúca (« la pierre du púca »).
Le púca était également présent dans la langue : « to play the púca » (dévaster ou saccager quelque chose, semer la pagaille) était une expression courante en Irlande au XIXème siècle.


Il a été avancé que le púca pouvait être la survivance tardive d'une ancienne divinité celte, que les croyances modernes auraient relégué au rang de lutin?, mais il n'existe que peu de preuves permettant d'étayer cette théorie.

Le púca est très proche, si ce n'est indiscernable d'autres créatures du folklore britannique au nom similaire comme le pwca gallois, le bucca de Cornouailles, le puck anglais, le pouque des îles de la Manche...
Il a été spéculé que le nom de poulpiquet / poulpican attribué localement au korrigan de Bretagne aurait la même étymologie que púca.


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Noms alternatifs : orthographe variable : pooka, phooka, phooca... bien que seule l'écriture púca soit correcte en irlandais moderne.

Localisation : Irlande, Europe

Bibliographie :

  • The Fairy Mythology, Illustrative of the Romance and Superstition of Various Countries, de Thomas Keightley (1880).
  • Ancient legends, mystic charms, and superstitions of Ireland, de Jane Francesca Elgee Wilde (1888).
  • La Grande Encyclopédie des Fées, de Pierre Dubois (2004), éd. Hoëbeke.

Liens complémentaires :

Traduction anglaise du conte Le piper et le púca, extrait du Leabhar Sgeulaigheachta de Douglas Hyde (1889)

Articles connexes :


Catégories : P ; Mythes et folklore ; Créatures
Auteur : Ar Soner
Mise en ligne : 09/08/15
Dernière modification : le 09/07/16 à 18:24